Surveiller les horaires, les dépenses, tracer un téléphone portable, utiliser des mots rabaissants, contrôler les sorties, les fréquentations: par des actes ou des propos multiples et répétés un agresseur isole et piège sa victime en exerçant un "contrôle coercitif", a exposé la ministre chargée de l'Egalité entre les femmes et les hommes, Aurore Bergé.
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"Une très grande victoire"
La proposition de loi visant à "renforcer la lutte contre les violences sexuelles et sexistes" adoptée mardi soir en première lecture par les députés (137 pour, 20 contre, 64 abstentions), prévoit de punir cette infraction de trois ans d'emprisonnement et 45.000 euros d'amende.
"C'est une très grande victoire, c'est la première fois en France que le contrôle coercitif entre dans la loi", s'est félicitée la députée MoDem Sandrine Josso à l'origine de la mesure votée.
Son amendement a été préféré à l'article initialement rédigé par Aurore Bergé, à l'époque députée avant de rejoindre le gouvernement, qui avait déposé début décembre cette proposition de loi transpartisane (signée par plus d'une centaine d'élus).
Selon Mme Josso, l'article initial élargissait la définition des violences psychologiques, mais restait insuffisant pour appréhender pleinement les dynamiques complexes de domination et de coercition conjugales.
Malgré de nombreuses réticences à intégrer trop rapidement cette notion dans la loi, une majorité de députés a finalement voté cette mesure, mais aussi appelé à l'améliorer avec un travail législatif à venir, notamment au Sénat.
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Elargissement de la "prescription glissante"
Outre cette disposition, les députés ont aussi adopté l'élargissement de la "prescription glissante" aux victimes majeures.
Ce principe permet de prolonger le délai de prescription du viol si la même personne viole ou agresse sexuellement par la suite une autre victime, jusqu'à la date de prescription de cette nouvelle infraction.
Mme Bergé a cependant échoué à faire adopter un article visant à rendre imprescriptible au civil des viols commis sur des mineurs, comme demandé par de nombreuses associations de victimes.
Certains députés arguant qu'une telle mesure risquait de donner des "faux espoirs" et de "laisser seule" la victime lors d'un procès.
Les députés ont également approuvé la durée maximale de la garde à vue de 48 à 72 heures dans les cas de viol (mais aussi de meurtre, assassinat, empoisonnement), avec le vote d'un amendement du gouvernement.
Lors des débats, de nombreux députés ont demandé au gouvernement une loi-cadre, plus ambitieuse, pour lutter plus efficacement contre les violences sexistes et sexuelles, mais aussi les prévenir.
La ministre a laissé la porte ouverte, affirmant envoyer cette semaine une lettre à tous les groupes de l'Assemblée pour qu'ils désignent des représentants en vue de constituer un groupe de travail autour d'une telle loi.
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