L'affaire, qui a captivé les médias du monde entier, sert de fil rouge à "Soumission chimique: pour que la honte change de camp", narré par Caroline Darian (son nom de plume) et réalisé par la journaliste d'investigation Linda Bendali. La chaîne publique a annoncé lundi qu'il serait programmé le 21 janvier à 21h10.
Ce film choral de 90 minutes, suivi d'un débat animé par Carole Gaessler, fait aussi témoigner six autres victimes. Elles ont été violées après avoir été droguées à leur insu, comme Gisèle Pelicot, livrée par son mari à des dizaines d'hommes recrutés sur internet pendant une décennie.
Zoé ne se rappelle plus de cette nuit de fête de la Musique en 2006 où elle a été violée, à 15 ans. Céline connaît son agresseur, son patron de l'époque, mais souffre, comme de nombreuses victimes, d'amnésie. Rénald se souvient des heures de torture infligées par le bourreau qui lui a offert un verre il y a 30 ans. Violée par son père, Lilwenn, 16 ans, a elle pu bénéficier de prélèvements capillaires prouvant qu'elle était régulièrement droguée...
Tous ont subi "un système", "un mode opératoire à part entière" longtemps resté sous les radars, comme l'a expliqué la productrice et co-autrice du documentaire, Andrea Rawlins-Gaston, lors d'une conférence de presse courant décembre, huit jours avant la condamnation de Dominique Pelicot et de 50 autres hommes.
"Sensibiliser davantage"
"Enfin, on lève le voile sur un fait de société qui est très largement sous-estimé et beaucoup plus répandu en France qu'on ne le pense", a abondé Caroline Darian, vantant un "documentaire d'utilité publique" sur un phénomène difficilement quantifiable.
La soumission chimique désigne "l'administration d'une substance psychoactive à une personne, sans qu'elle en ait connaissance ou sous la contrainte, dans le but de commettre un délit ou un crime, comme un vol, une agression sexuelle, un viol...", selon l'Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM).
En 2022, les signalements suspects de soumission chimique ont bondi de 69% sur un an, à 1.229, selon l'ANSM, qui a annoncé le 20 décembre travailler à des mesures pour réduire le risque de détournement de médicaments.
Mais ces données ne représentent que la partie émergée de l'iceberg.
Le documentaire doit ainsi permettre d'"aller chercher davantage de monde, sensibiliser davantage et même aider les victimes qui, aujourd'hui, soit s'ignorent, soit n'ont pas le courage d'aller vers une forme de prise en charge et de reconnaissance de leur statut de victime", selon Caroline Darian.
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"Réponse historique"
La co-fondatrice de l'association "M'endors pas" est elle-même convaincue d'avoir été droguée et violée par son père, qui l'a photographiée nue et inconsciente, dans une position prouvant, selon elle, qu'elle était "sédatée".
Formation des professionnels de santé, meilleure prise en charge des victimes, systématisation du prélèvement de cheveux pour détecter les empoisonnements... Les pistes d'action sont nombreuses pour apporter "une réponse historique à un procès historique", d'après elle.
La quadragénaire travaille actuellement avec la députée Modem Sandrine Josso, à la tête d'une mission commandée par le gouvernement sur la soumission chimique.
"Il faut que nos politiques s'emparent véritablement du sujet. Les réponses sont pluridisciplinaires" et n'appartiennent pas qu'au ministère de la Justice, de la Santé ou de l'Education, plaide Caroline Darian.
"Si on veut véritablement faire bouger les lignes en matière d'accompagnement et de prise en charge, voire même de détection des victimes, c'est un vrai plan Marshall qu'il faut", insiste-t-elle.
Déterminée à poursuivre "le combat de (sa) vie", Caroline Darian espère récolter des fonds pour son association, "lancer une grande campagne de sensibilisation" voire "lancer +M'endors pas+ en Angleterre", où sortira "en janvier" son livre "Et j'ai cessé de t'appeler papa", paru en 2022.
"Ma feuille de route est longue comme le bras", assure-t-elle.
