Des plaintes doublées
Le nombre de victimes de violences conjugales (coups, violences psychologiques, viols, féminicides) enregistrées en commissariat ou gendarmerie a plus que doublé entre 2016 et 2023, passant de 124.086 à 270.711, selon le Service statistique ministériel de la sécurité intérieure (SSMSI). Les deux tiers des victimes dénoncent des violences physiques.
Près de neuf victimes sur 10 sont des femmes (85%) quand, à l'inverse, près de neuf mis en cause sur 10 sont des hommes (86%).
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Pour Christelle Hamel, sociologue à l'Ined, cette augmentation "massive" des plaintes est due au mouvement MeToo. Les victimes sont plus nombreuses à dénoncer leur conjoint aux forces de l'ordre "parce que la parole se libère, parce qu'on y réfléchit, parce que le seuil de tolérance à cette violence diminue chez les femmes". Sans oublier les proches, "plus aptes aujourd'hui à entendre et à croire qu'il y a quelques années".
Mais encore beaucoup de silence
eulement 14% des victimes de violences conjugales ont porté plainte en 2022, selon une enquête de victimisation du ministère de l'Intérieur (Enquête Vécu et Ressenti en matière de Sécurité, VRS, 2023).
"Déposer plainte contre un proche est compliqué", note Christelle Hamel, insistant sur la nécessité "d'être protégée de manière rapide". "En matière de violences conjugales, outre le dépôt de plainte, la première revendication et le premier besoin des victimes, c'est l'hébergement d'urgence puis de long terme". Ce qui, "dans la pratique, n'est pas du tout une évidence".
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Dans l'ensemble, un tiers des violences physiques faites aux femmes sont infligées par un partenaire ou ex-partenaire. Et 1,4% des femmes en France a subi au moins un type de violences conjugales en 2021 et dans la grande majorité des cas, ces violences sont répétées (VRS 2022).
Plus de 40% des affaires classées sans suite
En 2023, un peu plus de quatre plaintes sur 10 ont été classées sans suite (43%), contre un peu plus de 3 en 2017 (34%), a indiqué le ministère de la Justice. Notamment pour "infraction insuffisamment caractérisée", "absence d'infraction" ou "extinction de l'action publique" (prescription par exemple).
"Le nombre de faits portés à la connaissance de la justice et datant de plus d'un an a augmenté de près de 200% entre 2017 et 2023", ajoute le ministère. Et les preuves sont alors plus difficiles à réunir.
En 2023, 9% des affaires ont été classées sans suite après la mise en œuvre d'une procédure alternative (interdiction de paraître au domicile du couple, interdiction de contact...) et 7% après exécution d'une composition pénale (par exemple un stage de sensibilisation aux violences conjugales).
Augmentation du nombre de condamnations
Au tribunal, les mis en cause sont largement condamnés (à 93,1% en 2023), à des peines d'emprisonnement dans 87% des cas.
En 2023, 41.346 peines d'emprisonnement ont été prononcées pour violence au sein du couple, un chiffre qui a plus que doublé depuis 2017 (17.757), selon le ministère de la Justice.
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Selon un rapport parlementaire publié en 2023, dans un tiers des cas en 2021, il s'agissait de prison ferme, avec une durée moyenne des peines de prison ferme qui a augmenté de 8,2 mois en 2017 à 9,3 en 2021.
Chaque jour, trois victimes de féminicides ou tentatives
Au total, en 2023, près de 1.200 femmes ont été victimes de tentatives de féminicides conjugaux, de féminicides conjugaux ou de "suicide forcé", sur un an, soit plus de trois femmes chaque jour, rappelle la Miprof.
Cette année-là, 96 femmes ont été tuées par leur conjoint (contre 23 hommes) selon le ministère de l'Intérieur.
327 femmes ont été victimes d'une tentative de féminicide au sein du couple.
Des chiffres auxquels s'ajoutent 774 femmes ayant tenté de se suicider ou s'étant suicidées à la suite du harcèlement de leur (ex-)conjoint.