Le président français, arrivé dimanche soir à Washington, sera reçu par son homologue à la Maison Blanche à 12H00 (17H00 GMT) pour un entretien en tête-à-tête, suivi d'un déjeuner et d'une conférence de presse conjointe à 15H00 (20H00 GMT), le jour même où l'Ukraine entre dans sa quatrième année de guerre.
Trois ans après sa rencontre de la dernière chance avec Vladimir Poutine, le 7 février 2022 au Kremlin, pour tenter, en vain, de le dissuader de toute offensive, cette visite a de nouveau tout d'une mission d'urgence.
Donald Trump a provoqué un séisme en annonçant vouloir négocier seul la paix avec Vladimir Poutine, qu'il replace ainsi au centre de l'échiquier, en empruntant à sa rhétorique et en vilipendant son homologue ukrainien Volodymyr Zelensky.
Les Européens redoutent que cette paix ne signifie une capitulation pour Kiev et n'encourage la Russie à opérer de nouveaux coups de force dans des pays voisins, y compris membres de l'UE, tout cela au moment où les Etats-Unis amorcent un désengagement.
"Vous avez une puissance qui s'est surarmée (...) et qui continue de se surarmer. On ne sait pas où elle s'arrêtera aujourd'hui. Donc il faut qu'on agisse tous pour la contenir", a martelé Emmanuel Macron avant son départ pour Washington.
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Coordination
Le président français se fera aussi le porte-parole des Européens, membres de l'UE ou de l'Otan, après avoir échangé avec la quasi-totalité de leurs dirigeants, y compris le Premier ministre hongrois prorusse Viktor Orban, depuis une semaine.
"Il va à Washington avec des propositions d'action qui reflètent les convergences qui se sont fait jour" lors de ces discussions, souligne un conseiller d'Emmanuel Macron.
Cela veut dire "continuer à soutenir l'Ukraine, à lui apporter le soutien militaire nécessaire, respecter sa souveraineté" et faire en sorte que "les intérêts des Européens soient pleinement pris en compte", détaille-t-il.
Pour cela, Emmanuel Macron entend convaincre Donald Trump que la Russie constitue une "menace existentielle", que Vladimir Poutine "ne respectera pas" forcément un cessez-le-feu et que celui-ci devra être vérifiable.
Avant de s'envoler pour Washington, Emmanuel Macron s'est aussi coordonné avec le Premier ministre britannique Keir Starmer, attendu à son tour jeudi à Washington, sur le message à délivrer.
Londres et Paris travaillent sur le déploiement d'une force européenne en Ukraine, une fois un accord de paix conclu, afin de dissuader la Russie d'attaquer une nouvelle fois ce pays.
"L'idée, c'est de déployer des soldats qui soient en deuxième ligne, et non sur la ligne de front. Ca pourrait être combiné avec une opération multinationale, avec des contingents extra-européens", indique une source française proche des discussions.
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"Son intérêt"
Les deux dirigeants devraient demander en contrepartie au président américain d'apporter de "solides garanties de sécurité" aux forces déployées.
L'administration Trump exclut tout déploiement de soldats américains au sol mais pourrait apporter un soutien logistique, des frappes en profondeur, du renseignement et s'engager à riposter en cas d'attaque russe, espèrent les Européens.
Ces derniers vont aussi s'engager à renforcer leur effort de défense, que Donald Trump veut voir porté à 5% du PIB contre 2% actuellement, jugeant que les Etats-Unis n'ont plus à payer le fardeau pour la sécurité du continent.
Emmanuel Macron espère aussi démontrer à son interlocuteur qu'en cédant trop à la Russie, il encouragerait son adversaire numéro un, la Chine, à pousser son avantage à Taïwan.
L'administration Trump abonde pour l'heure dans le sens de Moscou, jugeant "irréaliste" que l'Ukraine puisse récupérer les territoires conquis par la Russie ou entrer dans l'Otan.
"C'est son intérêt de travailler avec les Européens parce que l'Europe a une capacité de croissance, un potentiel économique, de coopération avec les Américains", suggère aussi le président français alors que Donald Trump a fait de la "diplomatie transactionnelle", avec à la clé de juteux contrats, sa marque de fabrique.
Les Européens riposteront à l'inverse à tous droits de douane supplémentaires sur leurs produits. "Entre alliés, on ne peut pas faire souffrir l'autre avec des tarifs" douaniers, a averti Emmanuel Macron samedi.