Chappell Roan critiquée sur les réseaux sociaux pour avoir rechigné à appeler à voter pour Kamala Harris
Un artiste est-il libre de se tenir à distance de la présidentielle aux Etats-Unis ? La pression subie par la star de la pop Chappell Roan pour soutenir Kamala Harris met en lumière l'influence de plus en plus importante, et parfois envahissante, des fans sur leurs idoles.
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La chanteuse américaine de 26 ans s'est retrouvée sous le feu des critiques sur les réseaux sociaux pour avoir rechigné à appeler à voter pour Kamala Harris, une position qu'elle a justifiée en critiquant l'administration Biden sur les questions de la défense des personnes LGBT+ et du soutien au peuple palestinien.
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De nombreux fans l'ont accusée de faire le jeu de Donald Trump, dont la gauche voit le retour à la Maison Blanche comme un cauchemar pour les droits individuels. Chappell Roan a eu beau expliquer que sa critique des dirigeants en place ne signifiait pas qu'elle voterait pour le milliardaire républicain, cela n'a pas suffi. Elle s'est sentie obligée de préciser qu'elle voterait bien pour Kamala Harris.
Visiblement éprouvée par la polémique, l'interprète de "Pink Pony Club" a annulé deux concerts le week-end dernier pour protéger sa santé, se disant dépassée par les événements.
L'univers des réseaux sociaux laisse peu de place à la nuance
Le phénomène n'est pas nouveau. De nombreux artistes, comme Taylor Swift, Ariana Grande, ou Doja Cat, ont déjà évoqué, y compris dans leurs chansons, la sensation de voir leurs fans vouloir prendre une forme de contrôle sur leur vie et leurs choix.
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Cette forme de relation crée chez les fans une "illusion d'intimité" et le sentiment que quelque chose leur est dû, explique Petra Gronholm, professeure spécialisée dans la santé mentale mondiale à l'École d'hygiène et de médecine tropicale de Londres.
"Il y a une idée de validation. Vous voulez que les artistes défendent publiquement ce que vous pensez qu'ils défendent ou ce que vous voulez qu'ils défendent, pour vous voir en eux en quelque sorte", explique-t-elle.
"Avec un acteur, on a toujours l'impression que ce qui se passe à l'écran est un rôle, et que cela ne reflète pas vraiment la réalité", abonde Mark Clague, musicologue à l'université du Michigan. "Alors que pour une chanson pop (...) cela vient de l'intérieur de l'artiste", ajoute-t-il.
Les réseaux sociaux ont exacerbé cette exigence pour les musiciens, et notamment ceux qui ont éclos plus récemment, de faire connaître leur position.
"La célébrité peut sembler plus fragile" que dans le passé, explique David Jackson, professeur de politique à la Bowling Green University. "Il y a probablement un plus grand besoin chez les célébrités, dans un environnement hautement médiatisé, de prendre le pouls de ce que pensent leurs fans", selon lui.
Et l'univers des réseaux sociaux laisse peu de place à la nuance.
"Les choses y sont plus binaires que dans la vraie vie", ajoute David Jackson.
"Au même titre que la religion, la musique peut générer de la dévotion"
Selon les experts interrogés par l'AFP, les fans n'attendent pas forcément que le soutien d'un candidat par leur star ait un impact politique, mais plutôt d'être rassurés sur le fait que leurs goûts musicaux correspondent à leur vision du monde.
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David Jackson fait un parallèle avec d'autres choix de consommation, comme les vêtements ou la nourriture, qui peuvent avoir une signification politique.
"Ce n'est pas totalement absurde que les fans veuillent au moins connaître la position des célébrités auxquelles ils donnent de l'argent", explique le professeur.
L'impact d'un appel à voter par une célébrité reste en tout cas difficile à évaluer. Dans le cas de Kamala Harris, le soutien semble "viser la mobilisation plus que la persuasion", selon David Jackson.
Lorsque Taylor Swift a soutenu Kamala Harris, elle a également publié un lien vers un site pour s'inscrire sur les listes électorales : résultat, 400.000 clics en 24 heures.
"Au même titre que la religion et la politique, la musique peut générer de la dévotion. Et motiver les gens à agir", ajoute Mark Clague.