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MeToo dans le sport : un ex-entraîneur de patinage condamné à 7 ans de prison

Dix-huit ans après les faits révélés par les plaignantes dans le sillage de l'ex-patineuse Sarah Abitbol, un ex-entraîneur de patinage artistique a été condamné mardi à sept ans de prison pour viols et agressions sexuelles sur mineures par la cour criminelle des Hauts-de-Seine.
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"Les actes sexuels dont la matérialité pour l’essentiel n’était pas contestée ont été obtenus de manière forcée par une contrainte morale qui résulte d’abord de l’âge des victimes, 13 et 14 ans, (...) de la différence d’âge entre l’accusé et les victimes (et) de l’autorité que (Sébastien C.) avait sur elle en sa qualité d’entraîneur de patinage artistique", a détaillé le président de la cour lors du verdict, après plus de trois heures de délibéré.

Il a "nécessairement conscience de ce qu’il forçait de très jeunes victimes à rentrer de manière précoce dans la sexualité", a insisté le président.

Il a aussi écopé de l'interdiction définitive de travailler, y compris bénévolement, au contact de mineurs.

Me Margaux Mathieu, l'une des avocates de Sébastien C., n'a pas souhaité commenter le verdict à ce stade.

"Justice a été rendue", a simplement réagi Anaïs (prénom modifié), l'une des deux plaignantes âgée de 31 ans.

"(Ce que j'ai vécu) a été entendu, reconnu, cru et condamné, quel soulagement!", a confié à l'AFP Emma, 30 ans, la deuxième victime qui a aussi souhaité rester anonyme.

Le parquet avait requis en fin d'après-midi 12 ans de réclusion criminelle.

Peu après le verdict, la compagne de Sébastien C. s'est effondrée au sol, en larmes.

Sébastien C. était jugé depuis jeudi par la cour criminelle des Hauts-de-Seine pour des viols et agressions dénoncés par deux plaignantes âgées à l'époque entre 13 et 15 ans, notamment à la patinoire même où il les entraînait.

Lui avait entre 25 et 26 ans lors des faits, entre janvier 2007 et décembre 2008, et nie fermement tout acte sexuel non consenti.

Lors de son interrogatoire, l'ex-entraîneur a maintenu la même ligne que celle tenue lors de sa mise en examen en 2020 et nié avoir imposé toute contrainte aux deux adolescentes à l'époque. 

"Pensez-vous qu’à 13 ans, un enfant est en pleine conscience en mesure de choisir?" cingle alors une assesseure. "Si c’était une enfant, je n'aurais jamais fait ça", répond-il, assurant plusieurs fois que selon lui la plus jeune des victimes avait "14 ans, pas 13".

"Je comprends le problème, j'ai un regard différent aujourd'hui, je percevais les choses vraiment totalement différemment à l'époque des faits", a-t-il pourtant ajouté.

Selon les deux plaignantes, c'est le livre de l'athlète Sarah Abitbol accusant son ex-entraîneur Gilles Beyer de viols qui les a incitées à agir.

Dans "Un si long silence" (éditions Plon), l'ancienne championne multimédaillée européenne et mondiale en couple dénonçait en 2020 des faits survenus entre 1990 et 1992, lorsqu'elle était âgée de 15 à 17 ans.

L'un des personnages dont l'ombre a plané sur l'audience, Michel Lotz, est accusé dans cet ouvrage de violences sexuelles par deux femmes dans les années 1980. 

La défense s'appuie également sur le rôle de cet entraîneur, qui a lui-même formé l'accusé. 

La "mise en confiance" des plaignantes par Sébastien C. lui "permettait de s'assurer du silence de ses victimes", a rétorqué lors de sa plaidoirie Me Justine Bulard, avocate d'Anaïs.

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"Omerta"


"Omerta", "ambiance sexualisée", l'audience a inscrit les faits jugés et le comportement de l'ex-entraîneur dans un contexte de silence complice et entretenu au sein du club, caractéristique de la "culture de l'impunité" dans le patinage artistique, selon Me Iris Pajot, avocate de l'association La voix de l'enfant, partie civile.

"Ce n'est pas le procès (des faits dénoncés par) Sarah Abitbol", a répliqué Me Margaux Mathieu, "ni du patinage, ni de la culture du viol", a complété Me Claire Roger-Petit, son autre conseil.

"En 2008, il n’a pas perçu la contrainte ou l’emprise", a plaidé Me Mathieu, demandant à ce qu'il soit acquitté des faits de viol et que les agressions sexuelles soient requalifiées en atteintes sexuelles sur mineur de 15 ans.

Depuis le début de l'enquête en 2020, plusieurs non-lieux ont été rendus concernant d'autres victimes qui accusaient le même homme.

Un autre entraîneur plus jeune, formé par l'accusé, est lui renvoyé dans le même dossier pour comparaître devant la cour d'assises des mineurs.

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