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Poursuivie par l'exploitant d'un oléoduc américain, Greenpeace risque gros

Près de dix ans après de grandes manifestations aux Etats-Unis contre un oléoduc décrié, l'ONG environnementale Greenpeace passe devant la justice américaine où elle risque plus de 300 millions de dollars d'indemnités, une procédure intentée par l'exploitant pour la "faire taire", dénonce-t-elle.
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Le procès qui oppose le groupe Energy Transfer à Greenpeace doit s'ouvrir lundi à Mandan, petite-ville de l'Etat rural du Dakota du Nord, et devrait s'étaler sur cinq semaines.


Avec un grand enjeu à la clé, selon Michael Gerrard, professeur de droit à l'université de Columbia et spécialiste des actions de justice climatique. "Si Energy Transfer réussit à imposer une forte amende à Greenpeace, cela encouragera d'autres entreprises à mener des actions similaires et pourrait décourager considérablement des mouvements de contestation", prévient-il auprès de l'AFP.

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Au coeur de cette bataille judiciaire, les manifestations menées entre 2016 et 2017 dans cet Etat contre le projet décrié du Dakota Access Pipeline, qui s'étaient soldées par des centaines d'arrestations et de blessés.


La tribu autochtone Sioux de Standing Rock et des groupes écologistes dont Greenpeace, rejoints en plusieurs occasions par des milliers de manifestants, avaient tenté en vain d'empêcher la construction d'un tronçon de l'oléoduc devant traverser, selon les Sioux, des sites sacrés et menaçant leurs sources d'eau potable. Le projet avait été relancé par Donald Trump lors de son premier mandat.

"Réduire au silence"


Energy Transfer accuse plusieurs entités de l'ONG de diffamation et d'incitation à la violence, ce qu'elle réfute en bloc, dénonçant au contraire une procédure bâillon.


"Les actions de Greenpeace à Standing Rock ont été pacifiques, légales et conformes à nos valeurs (...) Nous étions des alliés, en aucun cas les organisateurs", assure à l'AFP Sushma Raman de Greenpeace USA.

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Et de fustiger: "ce qui se passe, c'est que les grandes compagnies pétrolières essaient de réduire au silence Greenpeace et le mouvement dans son ensemble".


L'organisation fait valoir son droit à la liberté d'expression et assure que l'affaire a tous les traits d'une "procédure abusive" menée dans l'objectif d'intimider ou de faire taire des voix critiques.


Ce que dément le groupe. "Notre action en justice contre Greenpeace porte sur le fait qu'ils n'ont pas respecté la loi. Il ne s'agit pas de liberté d'expression comme ils essaient de le prétendre", a-t-il assuré dans un communiqué à l'AFP.

Batailles judiciaires


Les 300 millions de dollars réclamés par Energy Transfer visent à couvrir le préjudice que le groupe dit avoir subi."Un montant ridiculement élevé", fustige Kristin Casper, responsable juridique de Greenpeace International.


Il s'agit de la deuxième procédure intentée par Energy Transfer contre Greenpeace. Après un rejet en 2019 de sa plainte contre plusieurs ONG environnementales par la justice fédérale, le groupe a saisi la justice de l'Etat du Dakota du Nord.


L'ONG a quant à elle porté plainte mi-février contre le groupe devant un tribunal des Pays-Bas, où se trouve le siège de Greenpeace international, en invoquant une législation européenne visant à combattre les procédures abusives.


Elle y demande une indemnisation des coûts qu'elle a engagés dans ces batailles judiciaires. "Il y a le coût financier pour les organisations, mais aussi le coût humain car dans de telles situations, le processus lui-même est une punition", détaille Sushma Raman.


Et d'insister: "il nous appartient de veiller à ce que les entreprises réfléchissent à deux fois avant d'engager de telles poursuites abusives à l'avenir".

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