Un projet de parc éolien divise au large de Dunkerque

Au large de Dunkerque, un projet de parc éolien divise. Pour certains, il risquerait de mettre en péril les espèces animales qui y vivent. Pour d’autres, il permettra d’alimenter en électricité environ un million de personnes tout en respectant l’écosystème qui l’entoure.

Donc là, il faut imaginer qu’autour de nous, il y aura des éoliennes qui vont faire plus de 300 mètres de hauteur. Le parc éolien va s’étendre sur à peu près 15 kilomètres de long sur 4 de large” décrit Damien Chaumillon, chef de bord pour Sea Shepherd France, qui ajoute : “Pourquoi c’est un problème dans cette zone-là ? Parce que le Nord-Pas-de-Calais est vraiment une zone très, très passagère dans les espèces migratrices”. Ce à quoi Maxime Planque, chef de projet éolien en mer chez EDF Renouvelables, répond : “Tout ça est pris en compte dans l'étude qu'on a menée. La mer permet d'aller installer des parcs dans des zones où on a du vent quasiment tout le temps. Ces vents ont l'avantage d'être très réguliers. Donc c'est très bon pour une éolienne, d'avoir un vent qui soit régulier pour bien fonctionner. Un projet comme celui-là permet de produire l'équivalent de la consommation électrique d'environ 1 million d'habitants, soit un tiers des habitants du nord”. 

Ce cerf-volant est utilisé comme une éolienne aérienne


“On va constituer un groupe de travail dédié qui va analyser le comportement des oiseaux”


Le chef de projet éolien en mer chez EDF Renouvables explique que “les zones Natura 2000 ne sont pas des zones où il est interdit de faire toute activité humaine. Sur une zone Natura 2000, comme à Dunkerque, on va avoir de la pêche professionnelle, on va avoir du trafic maritime. Et compte tenu de cette situation, du parc à cet endroit, on prévoit, nous, en face, des mesures qu’on va pas forcément retrouver sur un autre projet qui n'aurait pas cet enjeu lié à des flux migratoires où on prévoit, dans le cas du projet de Dunkerque, deux mesures emblématiques sur l'avifaune. On a notamment fait le constat qu'en rehaussant la hauteur de l'éolienne, et donc en libérant un espace un peu plus grand entre le bas de la pale et la surface de l'eau, on pouvait réduire l'impact jusqu'à deux fois comme des espèces le fou de Bassan ou les goélands. Et donc, on a fait le choix aujourd'hui, techniquement, dans la conception du projet, de tout de suite avoir cette hauteur à la hauteur maximale, alors qu'on aurait pu faire moins”.

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Seconde mesure dont parle Maxime Planque : “En termes d'exploitation, on prévoit, dans le cadre du projet, de mener des suivis déjà enclenchés aujourd'hui et qui vont se poursuivre jusqu'à la construction et le début de l'exploitation. On va constituer un groupe de travail dédié qui va analyser le comportement des oiseaux, et en fonction de ce qu'on aura, notamment dans les flux migratoires et notamment dans les flux à l'automne, la possibilité d'arrêter les éoliennes en cas de risque d'impact trop fort par rapport à ce qui avait été initialement estimé”. Hervé Gauche, ornithologue et naturaliste, étudie et documente la faune locale. Il déclare : “Il y a des oiseaux qui passent ici, qui viennent d'Europe du Nord, très, très, très loin, d'Écosse, de ci et ça. Et on peut déstabiliser tout un système, toute une population d'oiseaux sur une partie de l'hémisphère nord, c'est quand même pas de la rigolade. Donc ce n'est pas qu'un choix français d'énergies vertes. est beaucoup plus vaste, en fait. Donc nous, on est là pour essayer de comprendre. On étudie, on essaie de documenter. C'est ça l'objectif”


Le principal danger, je pense, c'est le dérangement du milieu. Rien que le chantier, c'est pharaonique. Installer des éoliennes en mer, ce n'est pas rien. Ici, on est sur du sable, il faut creuser des fondations. Il n'y a rien de documenté au niveau des vibrations des pales quand elles tournent par exemple. Même à terre, ou à côté d'une éolienne, le mat vibre. Vous voyez, le goéland marin, là, qui passe, lui, il est dans les hauteurs de pales. Donc cet oiseau-là, s'il y a des éoliennes, il se fait hacher. En Allemagne, ils se sont rendu compte sur les implantations de parcs éoliens que le pingouin torda, il disparaît littéralement de la zone. On ne sait pas encore si c'est lié à des vibrations, à des perturbations. Ce n'est pas très documenté pour l'instant. C'est pour ça qu'on essaye de savoir” explique Hervé Gauche. 

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“Ce qu'il faut, c'est que la biodiversité marine soit au cœur des critères de sélection des endroits où on pose les éoliennes”


Maxime Planque, chef de projet éolien en mer chez EDF Renouvelables, considère qu’on a “un bon recul sur le fonctionnement des éoliennes en mer. C'est certes assez récent en France, puisque le premier parc a fêté sa première année d'exploitation. Par contre, on a un excellent retour d'expérience, je le disais, de Belgique et du Royaume-Uni, où là, ça fait plus de 20 ans qu'on fait de l'éolien en mer dans ces pays”. A propos des éoliennes marines, Lamya Essemlali, présidente de SeaShepherd France, donne également son point de vue : “On nous vend tellement l'énergie éolienne depuis des années comme étant une énergie propre, inépuisable, la solution miracle, l'alternative au nucléaire et aux énergies fossiles, etc. Sauf qu'en fait, on donne pas aux gens une information qui soit complète, claire et transparente. Et quand tu regardes de plus près et que tu vois l'impact que ça a sur la vie marine, tu arrives à un non-sens. Nous, on prend le sujet en disant : ce qu'il faut, c'est que la biodiversité marine soit au cœur des critères de sélection des endroits où on pose les éoliennes. Et à l'heure actuelle, en fait, c'est la dernière roue du carrosse. C'est-à-dire que les critères qui sont retenus pour choisir les endroits où on va poser les éoliennes, c'est des critères financiers, techniques, touristiques, liés au trafic maritime ou aux zones militaires”.

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A propos des zones choisies pour y implanter des éoliennes, Maxime Planque indique que ce choix “relève plutôt de la responsabilité de l'État où en effet, on a un certain nombre de critères qui sont analysés : avoir un endroit suffisamment venté pour aller mettre de l'éolien, regarder les autres activités. Nous, une fois qu'on est désignés porteurs du projet, le critère environnemental est celui qu'on va regarder en premier. Parce que finalement, cette étude d'impact qu'on compile dans le cadre de nos demandes d'autorisation porte à 95 % sur les impacts sur la biodiversité. Pour se décarboner, on va électrifier beaucoup de nos usages. Et donc qui dit électrification, dit, en face, moyens de production électrique décarbonée pour répondre à ces besoins. Et donc c'est là que l'éolien revêt un enjeu assez important. Ce qui est important aussi à la fin, c'est que le consommateur s'y retrouve. Et l'éolien en mer permet aujourd'hui, d'autant plus sur des sites comme à Dunkerque qui sont très bien ventés, de produire vraiment une énergie compétitive, qui en plus répond aux enjeux de dérèglement climatique et aux enjeux d'indépendance énergétique”.

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