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Enquêtes sur les violences policières : où en est-on ?

En 6 mois de mouvement des gilets jaunes, au moins 290 plaintes ont été déposées pour des violences policières. 220 enquêtes ont été confiées à l'IGPN, la police des polices. Où en est-on ?
Publié le
10
/
05
/
2019

Violences policières en France : rencontre avec les avocats Arié Alimi et Laurent-Franck Liénard


Depuis le début du mouvement des gilets jaunes, les images et les témoignages de violences policières sont nombreux. Mais, en presque 6 mois, aucun policier n'a été sanctionné où condamné par la justice. Pour en parler, Brut a rencontré deux avocats : Arié Alimi, avocat de plusieurs victimes de violences policières, et Laurent-Franck Liènard, spécialisé dans la défense des policiers.


Arié Alimi est l'avocat d'une dizaine de victimes ayant porté plainte contre la police. Il est aussi membre de la Ligue des droits de l’Homme. Voilà le point de vue d'Arié Alimi sur la situation : “Quand on compare les délais qui sont utilisés pour poursuivre un policier quand il a commis une violence policière illégitime et le délai qui est utilisé par le même procureur de la République pour poursuivre un gilet jaune quand il a commis une violence contre un policier, on se rend compte que le gilet jaune est poursuivi en comparution immédiate, au bout de 48 heures, il est jugé et il va en prison, éventuellement. Quand il s’agit d’un policier, au bout de 6 mois, on n’a toujours rien”.
Aux propos d'Arié Alimi, l'avocat spécialisé dans la défense des policiers Laurent-Franck Liènard répond : “Ce sont des délais normaux et usuels dans ces matières-là.” Pour Laurent-Franck Liènard, condamner un policier prend plus de temps que condamner un manifestant. Et la raison est la suivante : “La violence d'un gilet jaune dans une vitrine de magasin, elle est évidente. C'est évidemment illégitime, donc c'est facile à traiter. Comme c'est facile à traiter, la personne est interpellée en flagrant délit, elle est transmise immédiatement aux autorités de poursuite, qui la poursuivent immédiatement, parce qu'il n'y a pas de débat. Les actes, qui sont des actes de force commis par des policiers, sont, par principe, légitimes. Et ils deviennent illégitimes lorsque le policier a franchi la ligne.” Laurent-Franck Liènard ajoute : "La comparution immédiate, elle n'a aucun sens sur des affaires de police.”


Sur les 220 enquêtes confiées à l’IGPN, la police des polices, une cinquantaine ont été bouclées et transmises au parquet. Aux yeux d'Arié Alimi : “Il y a véritablement une décision politique judiciaire, de ne pas poursuivre ces policiers, ou de freiner les poursuites contre ces policiers”. Laurent-Franck Liénard voit les choses autrement : “Peut-être que le parquet, aujourd'hui, n'a pas envie de se dépêcher de faire condamner des policiers, en sachant que s'il fait condamner des policiers aujourd'hui, eh bien, les autre policiers vont, peut-être, avoir tendance à lever le pied très nettement sur les diligences, ou les efforts qu'ils font tous les samedis.


Depuis le début des manifestations des gilets jaunes, au moins 290 plaintes ont été déposées contre les forces de l’ordre : 92 concernent des tirs de LBD, 37 pour des grenades, 41 pour des coups de matraques. En mars 2019, le haut-commissaire aux droits de l’homme de l’ONU, Michelle Bachelet, a demandé à la France “une enquête approfondie sur tous les cas rapportés d’usage excessif de la force”.