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Acanthasters : ces étoiles de mer qui dévorent les coraux

Elles sont immenses, et elles sont le pire ennemi des coraux. En Nouvelle-Calédonie, Brut nature a suivi des scientifiques qui interviennent dans des zones infestées par les acanthasters, d'étranges étoiles de mer…
Publié le
13
/
06
/
2020

Dans l'océan Pacifique, des étoiles de mer dévorent le corail


L’acanthaster, qui peut mesurer jusqu’à 70 cm de diamètre et peser jusqu’à 3 kg, prolifère sur certains récifs coralliens. Et elle entraîne d’importants dégâts. Reportage en Nouvelle-Calédonie.


L’acanthaster est une étoile de mer bien particulière : elle est la seule à avoir plus de cinq bras. Et elle est massive : elle peut mesurer jusqu’à 70 cm de diamètre et peser jusqu’à 3 kg. Sur certains récifs coralliens de l'océan Pacifique, l’espèce prolifère. Or, lorsque les acanthasters sont trop nombreuses, étant donné qu’elles mangent les coraux, elles abîment durablement les récifs, voire les détruisent.


Brut s’en rendu aux abords du récif Larégnère, à une demi-heure de bateau de Nouméa, Nouvelle-Calédonie. Ici, les chercheurs ont détecté une infestation d'acanthasters il y a six mois.


Le corail est mangé par les acanthasters


« Une acanthaster, c’est très facile à reconnaître. Elle peut avoir jusqu’à 21 ou 22 bras, hérissés d’épines très venimeuses. Ça a des couleurs assez variées, ça va du rouge au bleu en passant les bruns », décrit Pascal Dumas, chercheur en écologie récifale à l'Institut de recherche pour le développement (IRD).


Les chercheurs repèrent les coraux morts aux zones décolorées du récif. « On voit encore la forme du corail, les branches, les doigts du corail digité, les tabulaires. Mais l’animal, l’organisme lui-même, a été mangé par les acanthasters. Il ne reste que le squelette. Donc c’est gris, c’est brun, et lorsque les algues s'installent dessus ça devient vert », détaille Pascal Dumas.


« Elles consomment le récif plus vite que le récif ne se régénère »


S’il existe peu de données sur le phénomène, on sait que les acanthasters sont présentes dans l’océan Indien, dans la mer Rouge et dans le Pacifique. « Un tiers des récifs de la zone du Pacifique sont touchés par les acanthasters. Ça ne veut pas dire fortement touchés, mais on en a détecté. Par exemple, on sait qu’à peu près un cinquième de la Grande barrière de corail a été détruite par les acanthasters », indique Pascal Dumas.


Dans certaines zones, le nombre de ces étoiles de mer est jugé normal. « Les acanthasters, comme toutes les espèces, ont un rôle dans leur écosystème. Ce n’est pas en permanence un problème. Ça ne le devient que lorsque les densités, leur nombre, devient tellement important qu’elles consomment le récif plus vite que le récif ne se régénère », explique Pascal Dumas. Les scientifiques n’ont pour l’instant pas trouvé la cause de l’explosion de leur population sur plusieurs récifs.


Il est impossible de prédire quand une « explosion » d’acanthasters aura lieu


Bertrand Bourgeois, technicien plongeur, a commencé à travailler pour l'IRD il y a 12 ans. Selon lui, le nombre d’acanthasters a commencé à devenir problématique il y a peu. « Il y a eu une première étude il y a peut-être y a 4 ans. Elle a été faite quand on a commencé à voir qu'il y en avait de plus en plus. Et il y a eu une explosion ces dernières années : l'année dernière, il y en avait tellement qu'elles se touchaient les unes les autres. »


Il est impossible de prédire quand une « explosion » d’acanthasters aura lieu. Et c’est bien ce qui inquiète les chercheurs. « Mais on a un certain nombre d’hypothèses, notamment le réchauffement des eaux et l’enrichissement en nutriments, c’est-à-dire notamment les engrais qui arrivent dans les eaux côtières et qui vont nourrir les larves d’acanthaster », tempère Pascal Dumas.


« On n’est pas sûr que les récifs puissent se régénérer »


Seule solution qu’ont aujourd’hui les scientifiques et les habitants pour sauver les récifs : retirer les étoiles de mer manuellement. « Dans le Pacifique, depuis très longtemps, les gens les ramassent. Ils vont les enterrer ou les brûler. On a développé des systèmes où leur injecte un produit létal, qui est beaucoup plus efficace. Ça peut être du jus de citron ou du vinaigre », explique Pascal Dumas.


Si la méthode ne fait pas l’unanimité dans la communauté scientifique, pour les scientifiques sur place, il est indispensable de protéger le récif Larégnère, et cela passe par le retrait des acanthasters. « Les récifs sont soumis à de très nombreuses pressions. Il y a le réchauffement, l’acidification des eaux de surface, les problèmes de pollution, les problèmes de surexploitation des récifs. Quand on rajoute par-dessus les acanthasters, on n’est pas sûr que les récifs puissent se régénérer », craint le scientifique.