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Brut a rencontré l'humoriste Melha Bedia
Melha Bedia : combattre la grossophobie par l’autodérision
Avant le confinement, Brut a rencontré l’humoriste Melha Bedia à Marseille.
Pendant longtemps, l’humoriste et comédienne Melha Bedia ne s’est pas sentie à sa place. Pourtant, elle affirme avoir toujours accepté son surpoids ; c’est la société qui en a voulu autrement. Alors la jeune femme s’est construit un personnage, celui de la bonne copine pleine d’autodérision qui se cache sous son bonnet. Mais Melha Bedia ne se voile pas la face : pour les personnes en dehors du « star system », la grossophobie est encore plus difficile à supporter.
« Ce sont les gens qui te font prendre conscience que tu n’es pas dans le bon moule »
Moi, à la base, j'étais bien dans mes pompes. C’est la société et mon entourage qui me disaient : « T’es sûre ça va, avec tes 106 kg, là ? Mais tu vas te marier un jour ? » Ce sont vraiment les gens qui te font prendre conscience que tu n’es pas dans le bon moule et que tu ne rentres pas dans les codes.
Très jeune je savais que j'étais un peu différente. J'étais timide, j'étais plus grosse que les autres, j'étais une boulotte, j’avais des lunettes. Je me suis dit : « Bon, Melha, on va analyser cette situation, c’est pas grave. Viens, on pleure pas. On pleurera plus tard chez le psy dans 10 ans, 15 ans. Mais là, viens, on analyse ça de manière très formelle. Tu vas t’auto-vanner avant qu’on te fasse des vannes. » C’est comme ça que j’ai commencé à développer cet amour pour la vanne, l’humour et l'autodérision.
« La presse féminine me fait me sentir moche »
La presse féminine, je lui en veux énormément, parce qu’à chaque fois que je passe devant un kiosque, elle me fait me sentir moche, inadaptée à la société. C’est ce que la société te renvoie au quotidien. Puis quand tu rentres chez toi, tu vas sur les réseaux sociaux, tu te dis : « Wow, elle, elle a plus de likes que moi parce qu’elle n’a pas un pet’ de cellulite. » Moi, si je fais un zoom sur mon bourlet, on va me signaler.
Je suis humoriste, donc je me cache derrière les vannes, derrière des « eh je suis la grosse ». J’ai un spectacle qui s’appelle Fat and Furious, et le film dans lequel je joue s’appelle Forte. J’en ai fait une force pour ne pas que ça m’atteigne, mais en vrai, c’est ultra dur quand tu rentres chez toi. Je fais un métier artistique, mais je pense à tous ces gens qui sont dans la vraie vie, qui ne sont pas dans les bonnes cases. Ils rentrent chez eux, ils vont sur les réseaux, et ils voient que personne ne leur ressemble.
« Il y a toute une génération derrière moi qui ne sent pas représentée »
Tu refermes un magazine et tu te dis : « Bon bah, c’est pas grave, je vais me détendre, Netflix ou un film en VOD. » Et là, tu vois un film sur des meufs qui ne sont pas de vraies meufs comme on en connaît. Toutes les comédies françaises que j’ai pu voir, même ailleurs, c’est des meufs qui se retrouvent à l'apéro qui boivent des shots et qui se disent : « Tu t’es pas épilée ? Too bad ! » On n’a jamais fait ça avec mes copines. C'est pas méchant, mais on ne se sent pas représentées. Moi, en tout cas, je ne me sens pas représentée, et il y a toute une génération derrière moi qui ne sent pas représentée.
Melha Bedia est à l'affiche du film « Forte », disponible sur Amazon Prime Video.