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Brut Book :"Sois jeune et tais-toi" de Salomé Saqué
“Je crois qu'on ne parle pas du tout de santé mentale, et particulièrement de la santé mentale chez les jeunes et surtout qu'on ne prend pas assez le problème au sérieux, politiquement particulièrement, parce que c'est un problème de santé publique majeur. Aujourd'hui, il y a un jeune sur cinq qui présente des troubles dépressifs, selon une enquête de Santé publique France. C'est deux fois plus qu'en 2017”. Journaliste et autrice du livre Sois jeune et tais-toi qui paraît en poche, Salomé Saquet nous explique pourquoi la santé mentale des jeunes devrait être plus “prise au sérieux”, à une époque où dans la société française, “les 18-29 ans sont deux fois moins nombreux que les plus de 60 ans”. Dans son livre, elle indique que ce mal-être est “multifactoriel” : “La condition économique de l'emploi, par exemple, des jeunes, s'est dégradée ces dernières décennies. Et l'éco-anxiété est un phénomène nouveau, qu'on n'observait pas avant, parce qu'il n'y avait pas ces thématiques de changement climatique qui étaient présentes dans l'espace médiatique, dans l'espace public. (...) Que l'on soit riche ou pauvre, quand on est jeune, on est plus exposé aux conséquences du réchauffement climatique, que lorsqu'on est plus âgé. Ça, ça a été montré notamment dans le dernier rapport du GIEC. ”
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“Pendant la crise du Covid, les jeunes non actifs ont été sacrifiés”
Salomé Saquet rappelle l’épisode du coronavirus qui a beaucoup affaibli le moral des jeunes : “C'était tellement fou à 20 ans, 18 ans, de se faire enfermer chez soi, priver de ses meilleures années, priver d'Erasmus, priver de vie sociale, priver de couple, priver de toutes les expériences structurantes. C'est des moments structurants de la vie. Ils ont été privés de ça du jour au lendemain, sans que personne ne s'en émeuve vraiment, sans qu’il y ait de politiques publiques d'ampleur qui soient mises en place pour pallier toutes les conséquences que ça avait. Et après, on leur a demandé de reprendre leur vie comme si de rien n'était. Mais bien sûr que c'était complètement inimaginable et donc d'autant plus choquant. Il faut rappeler que par exemple si les aides aux actifs, comme le chômage partiel, sont arrivées quasi immédiatement avec le premier confinement, ça a été beaucoup plus compliqué pour tout ce qui touchait les jeunes, alors que les jeunes étaient les premiers exposés à la précarité, parce que pour beaucoup, ils n’avaient pas de chômage partiel, par exemple”.
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Salomé Saqué affirme que durant la crise du Covid, la jeunesse en France a été “sacrifiée” : ”On s'est occupé avant tout des plus âgés qu'on voulait protéger de la maladie, des actifs dont on a garanti les revenus... Et les jeunes actifs, qui étaient parfois des non actifs car beaucoup étaient encore en études, ces jeunes-là ont été sacrifiés. Ça a impacté de manière absolument frappante leur santé mentale. Et on ne vit pas de la même manière un enfermement à 75 ans qu'à 20 ans. Il faut vraiment avoir ça en tête. Beaucoup de jeunes que j'ai pu interroger, et de milieux sociaux très différents, c'est-à-dire y compris ceux qui ont eu de très bonnes conditions de confinement, ils avaient l'impression qu'on leur avait volé des années”.
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Concernant le rapport entre temps d’écran et dégradation de la santé mentale, Salomé Saqué déclare ne pas avoir “trouvé d’étude”. Elle ajoute : “Ça dépend complètement de ce qu'on y fait. (...) Les écrans peuvent aussi être un facteur de lien. Et il y a beaucoup de jeunes qui vont trouver certaines communautés, qui vont trouver des endroits où ils peuvent parler de ce qui les anime sur les réseaux sociaux ou dans des jeux vidéo. Et c'est là où je me garde bien d'être dogmatique sur le sujet, parce que je pense extrêmement complexe à analyser. Mais de manière générale, je pense que beaucoup de jeunes se sentent incompris par le reste de la société et qu'il y a un phénomène aussi de repli sur sa propre génération pour parler avec des personnes qui comprennent ce qu’on vit. Et je pense que ça fait partie des choses qui ont vu naître le fameux "OK Boomer”, c'est que beaucoup de jeunes sont fatigués, en fait, d'entendre des critiques sur leur génération qui n'ont absolument pas lieu d'être, qui sont infondées, d'avoir des comportements de mépris de la part d'une partie des plus âgés auxquels ils doivent faire face et que la réponse, qui a été virale sur Internet, c'était le “OK Boomer”. Ça veut dire quoi ? Ça veut dire : de toute façon, tu comprends rien, tu n'essaies même pas de nous comprendre”.
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“Le problème, c'est avant tout les politiques qu'ils mènent qui ne prennent pas en compte les intérêts de la jeunesse”
Selon la journaliste, “le problème, c'est avant tout les politiques qu'ils mènent qui ne prennent pas en compte les intérêts de la jeunesse”. Elle développe : “À partir du moment où les jeunes votent moins que les personnes plus âgées, quand il y a un choix à faire, ils n'arrivent pas en premier. Je ne suis pas dans la tête des dirigeants. des intentions en tant que journaliste, mais je ne peux que constater qu'il n'est pas rentable électoralement de s'occuper des jeunes. Et ça, c'est extrêmement clair puisque les plus de 60 ans sont deux fois plus nombreux que les 18-29 ans. Donc on ne gagne pas des élections avec les voix des jeunes, surtout que les jeunes votent moins”.
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Salomé Saqué se dit enfin pleine d’”espoir” pour l’avenir : “Si on est une personne qui n'appartient plus à la génération des 18-29 ans que je décris dans le livre, on peut se pencher sur les jeunes de notre entourage et leur poser des questions, sur ce qu'ils vivent. Je pense que beaucoup de jeunes ont besoin de ça, d'être entendus, d'être écoutés réellement, sans jugement, et que ça, rien que ça, ça pourrait déjà énormément améliorer les choses. Ensuite, je pense que quand on est jeune, qu'il faut essayer de faire entendre sa voix au maximum. Il faut savoir qu'aujourd'hui, dans le contexte difficile que je viens de décrire, il y a quand même plus de jeunes qui s'engagent que de retraités. C'est nouveau. C'est une bascule récente. Et moi, ce qui m'a donné énormément d'espoir, c'était, pendant les signatures du livre, de voir des personnes qui venaient avec leurs parents, leurs grands-parents, qui s'échangeaient le livre, qui avaient de vrais sujets de discussion. Donc tout n'est absolument pas perdu. Et moi, je n'écrirais pas un livre comme ça si je n'avais pas un véritable espoir vraiment ancré en moi dans le fait qu'on puisse avoir une forme d'union intergénérationnelle, une solidarité qui se redéveloppe, qui aille contre cet individualisme qui est quand même latent dans notre société et qui nous permette de mieux faire société”.
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