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Rencontre avec le réalisateur Ladj Ly et l'actrice Anta Diaw
“Dans Bâtiment 5, on a un personnage féminin, noire, musulmane, qui porte le voile. Ce sont des personnages qu'on n'a pas l'habitude de voir au cinéma. J'avais aussi cette volonté de rendre hommage à toutes ces femmes qui habitent dans ces quartiers, qui se battent, qui créent des associations, qui militent. C'était ma façon de leur rendre hommage et en même temps de mettre en avant tout le travail qu'elles font sur place” explique Ladj Ly, qui a réalisé le film ‘Bâtiment 5’. Anta Diaw y tient le rôle principal. D’origine malienne de l’ethnie peul, Ladj Ly a grandi dans le quartier des Bosquets à Montfermeil en Seine-Saint-Denis. Adolescent, il tourne ses premières vidéos aux côtés de Kim Chapiron, JR, Romain Gavras, fondateurs ou membres du collectif Kourtrajmé. “A 17 ans, je me suis acheté une première caméra, je me suis mis à faire des films dans l'idée de raconter des histoires différentes, de raconter nos histoires”.
L’histoire de Makomé qui a inspiré le film "La Haine"
“Certaines personnes font des films qui parlent de banlieues alors qu'ils ne connaissent pas du tout. C’est un peu dérangeant”
Pour Ladj Ly, le premier film à avoir “vraiment” représenté la banlieue a été La Haine réalisé en 1995 par Mathieu Kassovitz. “C'était vraiment le premier film qui nous représentait. C'est un film qui nous a marqués et qui nous a beaucoup inspirés” commente le réalisateur français. Au moment de la sortie du film dans les salles, Thierry Jousse, qui est alors critique de cinéma, parle pour la première fois de “cinéma de banlieue”. Un terme que Ladj Ly “n’aime pas trop parce que (il a) l'impression que ça enferme une fois de plus dans une case”. “Le cinéma que je fais, ça reste du cinéma tout court. Les récits parlent de ces quartiers, mais ce n'est pas un cinéma de banlieue, non. (...) A chaque fois, de nous cantonner dans des cases, c'est un peu chiant”.
Mathieu Kassovitz sur son film ‘La Haine’, devenu culte
“Malheureusement, on a souvent tendance à mal parler de ces quartiers. Nous, c'est important de parler d'autres histoires, parce qu'il y a aussi plein de trucs positifs qui se passent dans ces quartiers” explique Ladj Ly. Il regrette qu’encore aujourd’hui, certains films qui ont pour décor la banlieue soient des “caricatures” de la réalité : “Certaines personnes font des films qui parlent de quartiers alors qu'ils ne connaissent pas du tout, et finalement, on a l'impression que ce n'est pas vraiment dans la réalité, on est forcément dans la caricature et c'est un peu dérangeant. (...) Avec mon scénariste, Giordano Gederlini, on fait en sorte de ne pas tomber dans la caricature et d'être vraiment dans la justesse, sans forcément prendre parti, et raconter une certaine réalité”.
Avec son équipe, il est parti en tournée à la rencontre avec le public. “Les retours sont vraiment très, très bien, j'ai envie de dire. Les habitants des quartiers ou, même pas, les spectateurs en général sont vraiment touchés par le film et je pense que ça fait du bien de décrire une réalité sans être dans les clichés. Je pense que c'est un film qui fait du bien et il y a beaucoup de gens qui sont concernés. J'ai lu une étude qui disait qu’il y a plus de 6 millions de mal-logés en France. Donc ça ne concerne pas que les gens des quartiers, ça devient un sujet national” conclut le réalisateur.