Insulte raciste pendant son spectacle : le message de Donel Jack'sman

"C’est inimaginable qu’aujourd’hui quelqu’un puisse se lever et dire "sale Noir" dans l’impunité totale." Victime d’une insulte raciste en plein spectacle, l’humoriste Donel Jack'sman aka l'homme au maillot a un message à faire passer.
Publié le
28/12/2018
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Donel Jack’sman, humoriste victime de racisme en plein spectacle


Alors que Donel Jack’sman était sur scène, un spectateur a crié « sale Noir ». C’était en 2018.


« J’étais sur scène en train de faire mon spectacle et j’ai entendu : "Sale Noir !" Donc woaw, c'est la violence, tout de suite... Les gens qui votent Front national, ce qui m'énerve, c'est qu'ils n'assument pas souvent. Lui, le monsieur, il l'a assumé, et c'est cool », réagissait Donel Jack’sman en 2018. Brut l’avait rencontré.


« Je me dis que ce n'est pas possible, on est au XXIème siècle »


Là, je suis vraiment perdu, parce que je me dis que ce n'est pas possible, on est au XXIème siècle, on est en France, on est dans un spectacle d'humour, ce n'est pas possible, je n'ai pas entendu ça... C'est pour ça que je demande trois fois, pour lui laisser une chance de désamorcer, de s'excuser, de dire : « Mais non, je rigole. »


Donc je lui redemande : « Pardon ? » Et là, j'entends une voix ferme et sans équivoque qui dit : « J’ai dit sale Noir. » Donc là, en moi, ça bout, j'ai des idées de violence, j'ai envie de descendre de la scène et que ça finisse aux mains. Mais j'ai un sursaut de lucidité ou de sensibilité, de fragilité, je me dis : « Non, ce n'est pas la bonne solution, je n'ai pas à répondre à la violence par la violence. »


« Les gens pensaient que c'était un complice tellement c'était gros ! »


Moi, dans mon spectacle, je prône la tolérance, je prône le vivre-ensemble, je prône l’amour, donc en tant qu'artiste mais aussi en tant qu'homme, je ne pouvais aller dans cette direction-là. Donc, j’ai pris le parti de mettre cette personne face à sa propre bêtise. « Mais t'aurais dû fermer ta gueule en fait... T'as mis ce qu'on appelle un malaise, qui n'apporte rien dans le spectacle. À part de la gêne pour toi, tout le monde est gêné pour toi. »


Les gens ont ri, peut-être pensaient-ils que c'était un complice tellement c'était gros ! C'est inimaginable qu’aujourd'hui, quelqu'un puisse se lever et dire « sale Noir » dans l'impunité totale, devant tout le monde. Quand j'ai vu la vidéo, quand j'ai vu tous les messages de soutien que j'ai reçus, quand j'ai vu les histoires que les gens m'ont racontées…


« Le racisme n'est pas une question qui ne doit intéresser que les Noirs »


Je ne peux pas laisser passer ça et je vais porter plainte. Quand je vois les politiques, toute l'année, qui parfois divisent, qui parfois cherchent à souffler sur des braises, je me dis, là, quand il se passe quelque chose comme ça, j'ai envie d'avoir le soutien des politiques. Il y a beaucoup de racisme en France. On ne peut pas le nier, il faut le combattre tous ensemble. Le racisme n'est pas une question qui ne doit intéresser que les Noirs ou que victimes de racisme.


C'est une question qui doit intéresser tout le monde, c'est une question d'ordre public, ça touche toute la France. Le racisme, c'est la peur ou la bêtise ou le manque d'éducation. On ne combat pas le racisme par la violence. Quelqu'un de raciste est souvent quelqu'un d'ignorant, est souvent quelqu'un qui a appris par ses parents, qui a appris par son environnement, qui a mal appris... Donc, c'est vraiment un travail qu'on doit faire mais qui passe par la pédagogie, qui passe par les professeurs, qui passe par les éducateurs, qui passe par l'État, qui passe par les institutions de la République. Nous sommes tous Français.


« J’entends des "rentre chez toi " mais chez moi, c'est la France »


Souvent, j'entends des « rentre chez toi », mais chez moi, c'est la France. Je ne rentrerai nulle part, je suis en France. C'est un pays multiculturel, c'est notre force, ce n'est pas une tare d'être différent. Le vivre-ensemble, c'est chacun vient avec sa différence, le vivre-ensemble, c'est de ne pas faire semblant, « je ne vois plus les couleurs, pour moi, il n'y a plus de Noirs, il n'y a plus de Blancs, il n'y a plus de gros, il n'y a plus… »


Si, il y a des gros, il y a des maigres, il y a des roux, il y a des Blancs, il y a des Noirs, il y a des femmes, il y a des hommes... Pour moi le vivre-ensemble, c'est accepter toute cette différence et vivre avec. Il y a beaucoup plus de Français qui veulent vivre en harmonie avec tout le monde. La différence gagnera, la mixité gagnera, c'est un combat qui prendra le temps que ça prendra, mais les racistes, vous ne gagnerez jamais.