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Delphine Horvilleur sur la place des femmes dans la religion

Sexistes, les religions ? Delphine Horvilleur est l’une des 3 seules femmes rabbin de France. Elle voudrait que les femmes aient plus de pouvoir au sein des différentes religions.
Publié le
24
/
10
/
2018

La place des femmes dans la religion, par Delphine Horvilleur


Elle est l’une des trois seules femmes rabbins de France. Pour elle, les textes sacrés ont de tout temps été interprétés par des hommes. D’où des préceptes conservateurs et misogynes.


« Ce qui est troublant dans nos traditions religieuses, c’est que les leaders parlent tout le temps des femmes. Ils parlent tout le temps des femmes, mais ils ne parlent jamais avec des femmes », remarque la rabbin Delphine Horvilleur. En France, elles ne sont que trois femmes à exercer cette fonction. Pour Delphine Horvilleur, la religion est en effet encore soumise à de puissants stéréotypes de genre.


« Des principes conservateurs qui sont malheureusement bien souvent ceux des religions aujourd’hui »


Les leaders parlent tout le temps des femmes quand il s’agit de décréter quelque chose sur le corps des femmes, sur la contraception, sur le planning familial, sur le droit d’une femme à disposer d’elle-même ou de son corps… Là, ils sont très présents pour parler des femmes, mais quand il s’agit de parler avec elles ou d’entendre leur voix, il y a comme un silence.


Dans la Bible, dans les textes religieux, il y a bien des héroïnes qui font changer l’Histoire. Si elles n’avaient pas accès à la parole et si elles n’avaient pas une voix politique, au sens premier du terme, une voix dans la cité, l’Histoire s’arrêterait là. J’ai en tête plein d’exemples dans la Bible : Rebecca, Esther, Ruth, tous ces personnages féminins extrêmement importants de nos textes. Ils sont là pour changer l’Histoire. Et si on ne leur avait pas fait de place au nom de principes conservateurs, qui sont malheureusement bien souvent ceux des religions aujourd’hui, le texte que nous lisons ne serait pas celui-là.


« Il faut de plus en plus de femmes qui puissent interpréter le texte, le lire, l’enseigner »


Il faut changer les modèles. Il faut de plus en plus de femmes qui puissent interpréter le texte, le lire, l’enseigner, avoir accès à une certaine érudition. Parce que si vous n’avez pas accès au savoir, vous n’aurez jamais accès au pouvoir. C’est particulièrement vrai dans le monde religieux. Si on change ces modèles, on fait grandir une génération avec d’autres repères.


On est héritiers dans nos traditions religieuses d’un monde où tout a été filtré par le regard, par l’interprétation et par la voix des hommes. Et ce n’est pas évident de repenser ça. Mais si on considère nos textes religieux comme sacrés, c’est qu’ils doivent continuer à être pertinents aujourd’hui.


On doit également accepter l’idée qu’on encense le parcours d’hommes et de femmes dans nos traditions qui ont changé leur temps, qui ont été capables d’être novateurs, de réformer le monde dans lequel ils vivaient. Dans toutes ces traditions, les héros sont des gens qui ont eu le courage de changer une perception figée qui était celle de leur temps. Être un enfant d’Abraham, c’est peut-être être capable parfois du même culot, de la même capacité de remise en question et de réforme qui a été celle de nos ancêtres.