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En Corse, les victimes de violences sexuelles sortent du silence
« I was Corsica », le #MeToo corse
Le mouvement est apparu début juin, après la diffusion sur plusieurs témoignages de femmes qui dénonçaient leurs agressions et les silences sur ces sujets en Corse.
« Violeurs on vous voit ! Victimes on vous croit ! », « Éduquez vos fils ! », « La honte change de camp* », scandent des manifestantes dans les rues d’Ajaccio. Avec de nombreux hommes, elles ont défilé contre les violences sexuelles et contre les agressions faites aux femmes. C'est le mouvement « I was Corsica », inédit en Corse.
« Il y a eu les hashtags #Balance TonPorc et #MeToo, mais ça n'a pas trop pris d'ampleur chez nous »
« En Corse, on ne pourra plus dire : ‘’Ah beh non, mets ça sous silence.’’ On a brisé le silence, on a ouvert la parole... Il y avait presque autant d'hommes que de femmes, on a vu dans le cortège des papas avec leur petite fille de 3 ans dans les bras, en train de pleurer, et les petites filles qui applaudissaient. C'est tellement émouvant de se dire que ça y est, ça nous touche », réagit Triss, Membre du collectif Collages féminicides Corse.
Pourquoi un tel mouvement maintenant ? Pour Anaïs, membre du collectif « I was Corsica », c’est avant tout une question de génération. « Il y a eu les hashtags #Balance TonPorc et #MeToo, mais ça n'a pas trop pris d'ampleur chez nous. #lwas a vraiment touché une génération de jeunes qui ont entre 15 et 25 ans. Je pense que le fait que l'on soit descendus dans la rue une première fois à Bastia – alors qu'à Bastia, il ne se passe jamais rien – les gens se sont dit : ‘’OK, là il se passe quelque chose, il faut qu'on en parle.’’ Les gens ne s'y attendaient pas. C'était spontané. »
« C'est du machisme dans le sens où on protège trop les femmes »
Le mouvement « I was Corsica » est apparu début juin, après la diffusion sur les réseaux sociaux de plusieurs témoignages de femmes qui dénonçaient leurs agressions, leurs viols, et les silences sur ces sujets en Corse. « C'est du machisme dans le sens où on protège trop les femmes. Les femmes, il faut faire attention à elles, ce sont des princesses, on leur ouvre la porte... Mais ça ne cache pas l'intrafamilial et ce qui se passe dans les villages, dans les lycées, et ça ne change pas le fait que la société nous a construits comme ça. Les Corses pensent comme. On est toujours dans ce milieu patriarcal, encore plus ici, qui nous oppresse », analyse Triss.
Aujourd’hui, les manifestantes entendent surtout toucher les plus jeunes. Car cette mentalité est trop ancrée chez les anciens. « Je pense qu'il y a une partie qui ne changera pas parce que c'est trop tard, c'est comme ça, c'est dans la culture, constate Anaïs. Mais à l'inverse, il y en a qui ont déjà commencé à ouvrir les yeux. Parce que c'est ça qu'on veut. Et c'est cool de pouvoir éduquer les gens. S'ils le comprennent, tant mieux. S'ils ne le comprennent pas, tant pis. Nous, on va continuer à se battre. »
Le mouvement Collages féminicides s'est étendu en langue corse
Pour mieux sensibiliser aux violences faites aux femmes et aux viols, sur l’île, le mouvement Collages féminicides s'est étendu en langue corse. « En Corse il n'y a pas de traduction pour le mot "violeur". Je pense que c'est important de coller en langue corse, parce que c'est très précieux chez nous. On est très insulaires, très fiers de notre île et de notre patrimoine. Je pense que ça touche beaucoup plus. D'ailleurs, depuis qu'on colle en corse, on a beaucoup plus de retours, beaucoup plus de réactions, même d'hommes, de tous bords politiques, qui nous soutiennent parce qu'on parle en corse et en leur nom », se réjouit Triss.