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Chasse à courre : la guerre entre chasseurs et militants animalistes

Il y a ceux qui la soutiennent et ceux qui se battent pour l'abolir. Alors tradition noble ou pratique barbare ? Enquête sur une pratique qui déchaîne les passions dans les campagnes françaises : la chasse à courre.
Publié le
24
/
01
/
2020

La chasse à courre, une pratique cruelle et controversée


Brut vous emmène avec le YouTubeur Le Tatou suivre une chasse à courre. Entre les chasseurs et les opposants, c’est particulièrement tendu.


La chasse à courre divise les campagnes françaises. D’un côté, il y a ceux qui soutiennent une tradition ancestrale. De l’autre, des défenseurs de l’environnement qui se battent pour l’abolir. « La chasse à courre propre, ça n’existe pas, affirme un militant. Il y a toujours de la violence, tout le temps de la cruauté, c’est la finalité de la chasse à courre. On ne peut pas dire que ce soit une belle chasse, c’est pas vrai. Et au milieu de tout ça, il a des riverains qui veulent juste être tranquille chez eux. Ici on a des enfants, on a des mamans, on a des familles, et on a peur ! »
 
Aujourd’hui, les parties de chasses à courre finissent souvent en confrontations entre militants pro et anti-chasse. Ils se filment mutuellement, se provoquent, parfois en viennent aux mains.


C’est quoi, la chasse à courre ?


 
La chasse à courre, ou vénerie, consiste à chasser un animal sauvage uniquement à l’aide d’une meute de chiens. Ce sont les chiens qui poursuivent le gibier, encadrés par un équipage à cheval ou à pied qu’on appelle les veneurs. Après plusieurs heures de poursuite, le gibier, épuisé est « servi » c’est-à-dire tué par l’un des veneurs avec une lance.
 
L’animal tué n’est pas mangé par les chasseurs, mais il est servi aux chiens lors d’une cérémonie que les veneurs appellent la curée. En vénerie, on peut chasser la moitié de l’année des espèces bien spécifiques : le cerf, le chevreuil, le sanglier, le renard, le lièvre et le lapin.
 
Un chasseur détaille son parcours : « Là, on cherche la trace d’un cerf, ce qu’on appelle plus communément le « vol ce l’est ». C’est l’empreinte de l’animal. Le chien a senti, il s’est mis à tirer fort. Le rôle essentiel de ce matin, c’est de pouvoir remettre un animal à un endroit bien défini pour l’attaquer avec ses congénères tout à l’heure. »
  
Lors de cette chasse, aucune bête n’a été prise. D’après les veneurs, ils n’arrivent à prendre le gibier qu’une fois sur quatre. Il est plus difficile d’obtenir des informations sur la curée : en général, les caméras ne sont pas les bienvenues lors de cette cérémonie.


Pas de souffrance animale d’après les chasseurs


Les chasseurs défendent leur pratique bec et ongle. L’une d’eux s’est confiée à Brut. « Je comprends tout à fait qu’il y ait des gens qui considèrent que chasser un animal pendant des heures est cruel. Mais ce qu’on fait faire à l’animal, ce n’est pas d’une cruauté extraordinaire. L’animal est dans son élément. Deuxième point, il court devant les chiens. Et cette course, finalement, est une course qui fait, quoi… Entre deux et quatre heures et qui n’est pas très différente de ce que fait un marathonien quand il fait 40 kilomètres en courant. Ce que j’apprécie, c’est que je suis très tournée vers les animaux, donc j’aime beaucoup mon cheval et les chiens, le travail des chiens, c’est extraordinaire à voir. »
 
« Bien sûr on défend la chasse ! Surtout la vénerie, c’est important ! Ça fait partie de la France ! Un cerf, il mérite une belle chasse, qu’il puisse se défendre, parce que qu’il n’est pas pris à chaque fois, loin de là. Les détracteurs parlent parfois d’une certaine souffrance de l’animal. Tout le monde souffre. Les humains souffrent aussi. Les poules dans les abattoirs. En ce moment, moi , je suis en train de vous parler, je souffre. Ça fait partie de la vie, ça. »


Des actes barbares selon les anti


 
Des argument que Jimmy, militant anti-chasse à courre, rejette en bloc. « Des veneurs, ou des gens qui proches de veneurs, vont nous suivre en forêt. Officiellement, c’est pour empêcher qu’on fasse des bêtises, en tout cas c’est leur version. Mais ils sont surtout là pour nous empêcher de filmer, et éventuellement nous agresser si on passe devant la chasse ou si on a des images compromettantes. »
 
Un chasseur réplique. « Alors déjà, c’est eux qui viennent en forêt pour suivre la chasse, n’inversons pas les rôles. Ensuite, si nous on est là, c’est pour empêcher qu’ils volent les chiens comme ils le font souvent, ou qu’ils agressent les veneurs. On a un ami qui a encore une minerve 15 jours après son agression par Jimmy et ses copains. »


Mais Jimmy ne se laisse pas impressionner. « Le fait d’avoir une pression récurrente sur les équipages, ça les oblige à faire plus attention à leur pratique. Ça passe aussi l’envie à certains d’aller chasser : c’est une pratique qui coûte très cher ! Les gens n’ont plus forcément envie investir autant s’ils savent qu’ils passeront une mauvaise journée du fait de notre présence. »


Des militants agressés


 
Entre pros et anti-chasse, c’est donc extrêmement tendu. Et quand les caméras des journalistes ne sont pas là, c’est encore plus violent, comme le montre le dialogue extrait d’une vidéo ci-dessous, publiée par une association anti-chasse.
 
« - Eh, mais ça va pas, non ?! Vous nous agressez ! Vous dégagez ! Vous ne touchez pas aux femmes ! J’en ai rien à foutre ! Vous ne connaissez pas la loi, Monsieur ?
- La loi, tu sais ce que j’en fais ?! »
 
Au-delà de ces deux camps, il y a les riverains, qui aimeraient que leur propriété privée soit respectée. C’est le cas de Xavier, un professionnel du tourisme qui loue des logements au cœur de la nature. « On est envahis par la chasse à courre. Des clients viennent et voient des chiens qui déambulent absolument partout, mais qui déambulent pour quoi ? Pour repérer le gibier à traquer, en l’occurrence le cerf ou le sanglier. »
 


Une pratique illégale en Angleterre


Et si on regardait de plus près ce que dit la loi ? Comme l’explique le Sénat sur son site Internet : « La loi du 3 mai 1844 réglementait le droit de chasse en instaurant un permis de chasse et en fixant les périodes de chasse. Son article 1er-repris à l'article L.222-1 du code rural- rappelait que " nul n'a la faculté de chasser sur la propriété d'autrui sans le consentement du propriétaire ou de ses ayants droit"».


Cependant, la loi autorise à achever un animal mortellement blessé, car ce n’est pas considéré comme un acte de chasse. Depuis peu toutefois, un arrêté a mis fin à cette autorisation si l’animal se trouve à proximité d’habitations, de jardins privés, de zones commerciales… En Angleterre et au Pays de Galles, la chasse à courre a été interdite avec le Hunting act au début des années 2000. Mais elle est encore légale en France.