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La crise du pétrole, une chance d'accélérer la transition énergétique ?

L'industrie du pétrole traverse l'une des pires crises de son histoire. Mais pour des ONG environnementales comme pour Nicolas Hulot, cette situation est une chance d'accélérer la transition énergétique.
Publié le
06
/
05
/
2020

La crise du pétrole, une chance d'accélérer la transition énergétique ?


Avec le confinement, l'industrie du pétrole traverse l'une des pires crises de son histoire. Pour des ONG environnementales, c’est une chance d'accélérer la transition énergétique.


Au mois d'avril, dans le monde, on estime que la demande de pétrole a été réduite d'un tiers. En cause : la réduction du trafic routier et aérien due à l'épidémie de Covid-19. Pour l'Agence mondiale de l'énergie, c’est le « plus grand choc pour le système énergétique mondial depuis plus de 70 ans ».


Pour la première fois, le prix du pétrole est passé sous la barre de zéro


« Tout le transport est à l'arrêt : les avions, les voitures, même le commerce de marchandises. Or, l'essentiel de la demande de pétrole, c'est pour le transport », analyse Philippe Copinschi, spécialiste des questions énergétiques. Il poursuit : « Plus de transports, plus de demande, mais l'offre qui continue. Ça crée un déséquilibre énorme qui explique l'effondrement du prix. »


Ce déséquilibre a fait que, pour la première fois dans l'histoire, le prix du pétrole est temporairement passé sous la barre de zéro le 20 avril dernier. « Les tankers étaient en train d'arriver, donc les traders devaient absolument se débarrasser de ce pétrole. Sinon, ils devaient payer des moyens de stockage. Et comme le ralentissement de la demande a fait que les stocks sont complètement pleins, ils n'arrivaient plus à trouver de clients et ils étaient prêts à payer pour se débarrasser du pétrole qu'ils avaient acheté », développe Philippe Copinschi.


« La pire année dans l'histoire du marché pétrolier »


Depuis, les prix sont remontés, mais restent très inférieurs aux tarifs habituels. Pour le directeur de l'Agence Internationale de l'Énergie, 2020 peut déjà être considérée comme « la pire année dans l'histoire du marché pétrolier ». L'épidémie de Covid-19 a en effet complètement bouleversé la scène pétrolière, qui était déjà assez instable depuis plusieurs années, selon Philippe Copinschi.


« Il y a une augmentation très importante de l'offre, c'est-à-dire de la production, notamment du fait de l'incapacité des pays de l'Opep, des États-Unis et des autres grands pays producteurs à s'entendre pour essayer de limiter leur production », ajoute le spécialiste des questions énergétiques. D’après lui, cette année, il est probable que la demande de pétrole ne reparte pas à la hausse, car les gens vont moins se déplacer.


« On peut très bien planifier une économie globalement décarbonée »


Pour des ONG environnementales, comme pour Nicolas Hulot, interrogé par Brut, cette situation inédite est une chance d'accélérer la transition énergétique. « On peut très bien planifier une économie globalement décarbonée, mais il faut y mettre le paquet. En matière énergétique, les choses ont beaucoup évolué. Les énergies renouvelables qui n'étaient pas rentables le deviennent. Il faut qu'on investisse sur les transports doux. On est capables de construire des cargos à voiles », argumente Nicolas Hulot.


May Boeve, directrice exécutive de l'ONG 350.org, partage son constat : « Les failles structurelles de cette industrie étaient déjà visibles avant cette pandémie. Mais elle a révélé à quel point nous sommes tous vulnérables aux chocs économiques, et particulièrement aux chocs du prix du pétrole. Si nous ne saisissons pas ce moment pour nous détourner de l'économie de l'industrie pétrolière, moteur du réchauffement climatique, nous pouvons nous attendre à d'autres chocs. »


« Les gens peuvent changer leurs habitudes incroyablement vite »


Alors que la crise actuelle rend les investissements pétroliers risqués, les ONG espèrent que les entreprises pétrolières seront encouragées par les gouvernements à investir dans les énergies renouvelables. « Nous constatons que les gens peuvent changer leurs habitudes incroyablement vite et que lorsque des vies humaines sont en jeu, les gouvernements peuvent mobiliser des ressources, et nous savons que des vies humaines sont en jeu face à la crise climatique », conclut May Boeve.