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Pendant ce temps-là… – Dans le jardin punk d'un paysagiste

Son jardin d'un hectare, ce paysagiste le surnomme "le jardin punk". Il ne l'entretient que cinq jours par an, l'arrose peu, et pourtant le résultat, c'est ça. Pendant ce temps-là, à Joigny, dans le jardin punk d'Éric Lenoir…
Publié le
19
/
06
/
2023

“C'est l'histoire d'un mec qui en a marre qu'on lui dise que ce n'est pas possible”

Eric Lenoir est paysagiste et l’auteur du Grand traité du jardin punk. Brut est parti à sa rencontre, à Joigny, dans le département de l’Yonne, pour découvrir son jardin punk. “L'arrosage, ici, c'est zéro, dans le jardin. En onze ans, maintenant, il y a eu quatre arrosoirs de distribués”. Avec son jardin, il souhaite montrer qu’il ne faut pas forcément avoir de grands moyens pour rendre un jardin "spectaculaire". “C'est l'histoire d'un mec qui en a marre qu'on lui dise que ce n'est pas possible, qui en a marre de voir les gens faire n’importe quoi parce qu’ils disent que ce n’est pas possible parce qu'on n'a pas le pognon, pas le temps, ni le personnel, parce qu'on n'a pas les connaissances. Je veux que ce jardin ouvre le champ des possibles. Et pour l'instant, ça marche plutôt pas mal”, confie-t-il. 

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Et pour rendre son jardin “spectaculaire”, son temps de travail est autour de cinq jours d’entretien par an. “C'est un lieu qui a des fonctions très précises : accueil de biodiversité maximum, faible entretien, impact écologique le plus positif possible et donner envie à des gens qui ont le pouvoir de faire différemment de faire différemment”. Son jardin immersif permet à chaque personne de se sentir bien dans au moins un endroit. Pour le paysagiste, c’est sous une allée de bouleaux qu’il a plantés il y a onze ans et qui sert d’habitat à certaines espèces d’oiseaux. 


Il n’arrose pas ses plantes, la terre est sèche, pourtant les fleurs offrent leurs plus belles couleurs. “C'est l'ensemble qui se stimule: les herbes qui vont faire des racines qui vont profiter aux arbres, les racines des arbres vont profiter à certaines herbes, les branches mortes qui tombent petit à petit, elles créent de l'humus en surface, une partie des fleurs, quand les fleurs vont tomber, ça fait de la matière organique en grande, grande quantité. Par contre, si tu as besoin de faire pousser ta bouffe, c'est autre chose”, ajoute Eric Lenoir. 

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Qu’est ce qu’un jardin punk ? 

Je n’ai pas inventé le jardin punk, je l'ai défini. C'est complètement différent. Il y a plein de gens qui faisaient des jardins punk qui ne savaient pas qu'ils faisaient des jardins punk, et moi non plus, avant que j'écrive le traité du jardin punk. L'idée, c'est: comment est-ce qu'on peut faire en faisant le moins possible". Le bruit des grenouilles au bord du lac, le chant des oiseaux dans les arbres, Eric Lenoir les adore, d’autant plus que ces phénomènes ne dépendent pas de lui : “Ça, tu vois, je gère pas, ça. Je ne maîtrise pas, je ne les ai pas implantées. Mais quel bonheur ! Trop bien”. 


Mais même si ce jardin ne semble pas, au premier abord, lui demander beaucoup d’entretien, sa conception lui a pourtant pris une année entière. “J'ai regardé le terrain pendant un an. Je suis allé voir les alentours, je regardais ce qui poussait spontanément ou pas. J'ai regardé comment évoluaient d'autres champs qui avaient été abandonnés ou pas. Et à partir de ça, j'ai fait mon dessin. En envisageant tous mes besoins, toutes mes envies, les nécessités et j'ai créé des grandes lignes”. 

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De la pivoine au rosier, en passant par la fritillaire œuf de pintade, un grand nombre d'espèces s’est développé dans le jardin punk d’Eric. “Toutes les allées sont tondues à la tondeuse. Le reste, la prairie n'est jamais fauchée intégralement. Donc j'évite, par exemple, que mes voisins aient trop de chardons. Parce que j'ai pas envie qu'ils mettent encore plus de produits chimiques dans leurs champs. Donc quand les chardons ont fini de fleurir, ceux qui sont les plus près du champ, je les coupe et les ronces, pareil. Je n'ai pas d'ennemis, mais l'un de mes objectifs ici est de conserver la prairie au maximum. Si je fais rien, ça devient un bois. Le champ, quand je l'ai acheté, c'était recouvert de ça, de rumex et puis de chardons, un peu de graminée et d'autres choses”. 


Si parfois, les visiteurs qui se rendent dans son jardin lui disent que c’est peu d’entretien, Eric Lenoir sait quoi leur répondre : “Je les emmène ici, je leur montre, là : quand je laisse tout faire, il y a un taillis impénétrable d'arbres qui font six ou huit mètres de haut. Ça, c'est quand on ne fait rien, sur le même terrain. Ça rappelle qu'en faisant très peu, finalement, on transforme déjà beaucoup le milieu et on arrive à avoir de beaux résultats. Et ça laisse aussi imaginer à quel point on peut devenir n’importe quoi quand on agit plus”. 

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