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8 questions sur la menace terroriste en France

Quel est le niveau actuel de menace terroriste en France ? Quelles organisations menacent notre pays ? À quoi servent vraiment les fiches S ? 8 questions sur la menace terroriste en France.
Publié le
17
/
10
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2023

“La menace terroriste en France est élevée à l'heure actuelle”


La menace terroriste est considérée comme élevée depuis des années. Simplement, depuis l'attentat d'Arras, il y a un niveau d'alerte supplémentaire qui a été enclenché parce qu’on a eu une attaque et que, potentiellement, il pourrait y en avoir d'autres”. Marc Hecker est directeur de recherche à l’Ifri (Institut français des relations internationales). Il revient pour Brut sur la menace terroriste qui existe en France. “Aujourd'hui, on considère que la menace reste élevée, mais moins qu’en 2015 (ndlr : année des attentats de Charlie Hebdo, de l’Hyper Cacher et du 13 novembre 2015) parce qu'en réalité, elle a changé de nature. En 2015, on avait une menace terroriste dite projetée, c'est-à-dire que l'État islamique, Daech, était capable de former des commandos terroristes en zone syro-irakienne et de les projeter vers l'Europe”. 

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“Aujourd’hui la menace a évolué. On a eu un intermède, avec une menace dite téléguidée, c’est-à-dire qu'on avait des individus en zone syro-irakienne qui désignaient des cibles à des personnes en France. Ça a été par exemple l'attentat de Saint-Étienne-du-Rouvray, avec le prêtre Jacques Hamel qui avait été égorgé dans une église. Et puis, on a eu ensuite une menace dite inspirée, du terrorisme d'inspiration, c'est-à-dire que c'était essentiellement des individus qui passaient à l'acte, mais sans nécessairement avoir un lien opérationnel avec des cadres de Daech. On parle régulièrement non seulement de terrorisme d'inspiration, de terrorisme low cost, parce que les moyens utilisés sont très simples et du coup, ce sont des attentats qui sont aussi très difficiles à prévenir” explique le directeur de recherche. 


Plusieurs raisons expliquent que la France est “un pays particulièrement ciblé dans la propagande de Daech” : “Elle est considérée comme en guerre contre l'islam. C'est évidemment la propagande de Daech qui dit ça. Toutes les lois et tous les dispositifs qui entourent la laïcité sont présentés dans la propagande djihadiste comme de l'islamophobie institutionnalisée. Elle est présentée aussi à l'extérieur de ses frontières, puisque la France est particulièrement active dans sa diplomatie mais aussi dans son action militaire dans le monde musulman” indique Marc Hecker, qui ajoute : “La France est particulièrement ciblée, mais ce n'est de loin pas le seul pays ciblé par la propagande de Daech, qui, en réalité, considère l'Occident comme un tout honni. Et on voit, par exemple, que pour l'Europe, on a eu des attentats liés à la mouvance djihadiste internationale dans une douzaine de pays depuis 2015. Donc la France est loin d'être isolée et est loin d'être la seule cible. Évidemment j'ajoute aussi que dans ce monde occidental, les États-Unis sont une cible prioritaire de Daech. Mais ce qu'il faut voir aussi, c'est qu'en dehors du monde occidental, Daech est aussi actif et a conduit des attentats, par exemple en Iran ou par exemple contre la Russie. Donc on voit vraiment que Daech est dans une logique de lutte des civilisations et que la France est un ennemi de cette organisation parmi tant d'autres”. 

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La menace est devenue très diffuse. Il y a des milliers d'individus qui figurent dans les fichiers S”


Le directeur de recherche indique que si “la menace djihadiste reste la menace principale, l'ultradroite est une menace très sérieuse à prendre en compte. Le ministère de l'Intérieur déjoue régulièrement des attentats dans le pays. Depuis 2017, il y a plus de 40 attentats djihadistes qui ont été déjoués. Pour ce qui est de la mouvance d'ultradroite, c'est une dizaine. Et pour l'ultragauche, en général, il y a un attentat qui est cité comme ayant été déjoué depuis plusieurs années en France. Daech de choc des civilisations et ce qu'il souhaiterait vraiment, c'est qu'il y ait un attentat d'ultradroite contre les communautés musulmanes en France, ce qui pourrait polariser encore davantage et hâter leur prophétie de guerre civilisationnelle opposant les musulmans dans leur ensemble au monde occidental, au monde non musulman. Il est extrêmement important, du coup non seulement de prévenir les attentats djihadistes, mais également de surveiller de très, très près la menace d'ultradroite, de déjouer les attentats et de les juger de la même manière que les djihadistes”


La France a un arsenal antiterroriste qui est vraiment très développé. Parmi les pays occidentaux, c'est un des pays ayant l'arsenal antiterroriste le plus complet. Et il faut dire que la France a une longue expérience du terrorisme, bien avant la mouvance djihadiste qu'on évoque là. Sans remonter au 19e siècle, on peut dire que sur la deuxième moitié du 20e siècle, on a eu du terrorisme régionaliste, on a eu on a eu du terrorisme d'extrême droite, on a eu du terrorisme d'extrême gauche, et en fait, l'arsenal s'est adapté progressivement. Mais évidemment, ça ne veut pas dire que les services de renseignement seront capables de tout déjouer. La menace est devenue très diffuse. Il y a des milliers d'individus qui figurent dans les fichiers, en particulier dans le fichier des signalements pour la prévention de la radicalisation à caractère terroriste, le FSPRT. Il y a actuellement un peu moins de 6000 fiches actives dans ce FSPRT et évidemment, il est impossible de suivre tout le monde 24 heures sur 24, surtout si les modes opératoires choisis sont des modes opératoires low cost, extrêmement difficiles à prévenir” déclare Marc Hecker. 

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A propos des fiches S, le directeur de recherche déclare que “ce sont des fichiers de renseignement, c'est-à-dire que ça permet d'avoir des informations sur ces personnes, de dicter des conduites à tenir, notamment pour les policiers qui vont effectuer des contrôles. Il y a évidemment différents niveaux dans les fiches S, avec différentes conduites à tenir et des méthodes plus ou moins intrusives de renseignement qui vont pouvoir être utilisées. Mais ce qu'il faut bien comprendre, c'est que ce ne sont pas des fichiers judiciaires. C'est-à-dire qu'à partir du moment où, en termes suffisamment d'éléments sont collectés pour pouvoir judiciariser le renseignement, à ce moment-là, il est possible de poursuivre ces individus et éventuellement de les mettre en prison. Mais tant qu'ils n'ont pas commis d'infraction, eh bien là, les pouvoirs publics ne peuvent pas véritablement, dans un Etat de droit, les empêcher de nuire préventivement”

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