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Les bons mots pour définir les violences sexistes et sexuelles

Un "pédophile" ? Non, un "pédocriminel". Un "drame conjugal" ? Non, un "féminicide". Pour Caroline De Haas du collectif Nous Toutes, voilà pourquoi il est important d'utiliser les bons mots.
Publié le
25
/
11
/
2020

Savoir définir les violences sexistes et sexuelles


De nombreux termes sont employés pour qualifier les violences sexistes et sexuelles : « attouchements », « frotteur », « gestes déplacés », « abus sexuels ». Ils ne sont pas toujours justes. Caroline De Haas explique quels sont les termes appropriés.


« En fonction des mots que vous utilisez, vous allez créer des images et des perceptions différentes », indique Caroline De Haas, Militante féministe et fondatrice du collectif #NousToutes.


Les agressions sexuelles


Le mot « attouchements » ne figure pas dans le Code pénal, « donc quand on parle d’attouchements, on décrit quelque chose qui n’est pas qualifié », explique Caroline De Haas. Généralement, lorsque l’on parle d’attouchements, il est question de main aux fesses ou aux seins. Il s’agit, en vérité, d’une agression sexuelle.


« Imaginez, vous êtes en soirée avec des potes, et là une copine dit : "Oh là là, hier dans le métro j’ai été victime d’un attouchement." Une heure après, une autre copine dit : "Oh là là, hier soir dans le métro, j’ai été victime d’une agression sexuelle." Laquelle des deux expressions paraît la plus grave ? »


Le terme « agression sexuelle » qualifie les choses de manière juste, d’après la militante. En revanche, le mot « *attouchement *» est un euphémisme. Il rend la réalité moins grave que ce qu’elle est vraiment.


Les « gestes déplacés »


Le terme « gestes déplacés » est souvent utilisé pour qualifier du harcèlement sexuel ou une agression sexuelle. L’expression est inappropriée. De plus, elle banalise l’action et brouille les pistes, puisqu’on ne sait pas exactement de quoi il est question.


« Au travail, si vous avez un collègue qui, tous les matins, vous mime un acte sexuel et que ça génère chez vous du stress, du malaise, ça s’appelle du harcèlement sexuel. Un geste déplacé, ça peut être aussi, par exemple, une main aux fesses. Ça, c’est une agression sexuelle », note Caroline De Haas.


L’expression « frotteur » est aussi une façon de minimiser l’acte de l’agression sexuelle. C’est un délit pouvant être puni de cinq à 10 ans de prison en France.


« On ne peut pas abuser d’un enfant »


« Abus sexuels » est un terme qui n’existe pas dans le Code pénal non plus, indique la fondatrice de #NousToutes. Ce sont pourtant des mots régulièrement utilisés pour évoquer les agressions sexuelles et les viols sur mineurs. D’autre part, le mot « abus » définit l’usage excessif de quelque chose.


« Vous avez mangé beaucoup de chocolat, vous avez abusé. Vous avez passé beaucoup de temps sur les réseaux sociaux, vous avez abusé. Vous êtes allé trop loin, c’est de l’abus. Est-ce que, en matière de violence sur les enfants, là ça va, là ça va, et puis oh ! Oh bah non, mais là, non mais là, tu as abusé. Ça ne fonctionne pas. On ne peut pas abuser d’un enfant. »


Le terme approprié est « pédocriminalité » ou « pédocriminel ». Car la « pédophilie », dont l’étymologie est l’amour des enfants, est un terme injustement employé, d’après Caroline De Haas.


Le « drame conjugal », un terme cinématographique


« Quand on parle de "drame conjugal", on fait appel au vocabulaire un peu cinématographique, un "drame" », analyse la militante. Il est pourtant utilisé pour désigner un meurtre aggravé ou un féminicide, qui sont les termes corrects.


D’après Caroline De Haas, les expressions « drame conjugal » et « drame passionnel » devraient disparaître du vocabulaire. Elles ont en effet tendance à banaliser la réalité des faits et masquent la responsabilité des personnes violentes.


« En matière de langage, chacune et chacun peut agir. Évidemment que les médias, les journaux, les télés, ont une responsabilité importante. Mais chacune et chacun d’entre nous peut faire bouger les lignes », assure la militante. Les mots employés ont un impact sur les victimes, qui peuvent culpabiliser, ou sur les agresseurs, dont les actes sont banalisés.