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L'interview dans Playboy qui aurait pu faire perdre Jimmy Carter
Quand « Playboy » avait interviewé Jimmy Carter
Malgré ses nombreux propos problématiques sur les femmes, Donald Trump a été élu président des États-Unis et pourrait même être réélu. L’historien Thomas Snégaroff raconte une interview dans « Playboy » qui, elle, a failli coûter sa carrière à Jimmy Carter.
Donald Trump a remporté l’élection présidentielle américaine en 2016. Pourtant, le politicien est connu pour ses propos nombreux sexistes et misogynes. Une situation surprenante pour l'historien Thomas Snégaroff : « Je me dit qu’on vient quand même de très, très loin. Je vais vous raconter une histoire qui date de 1976. On est en pleine campagne électorale, en été 1976. Du côté démocrate c’est Jimmy Carter et du côté républicain, c’est le Président Gerald Ford. »
Un type banal
À l’époque, Jimmy Carter est gouverneur de Géorgie. L’homme est peu connu des Américains et cherche à se faire un nom. Il accorde donc de nombreuses interviews et souhaite montrer l’image d’un « regular guy », un type banal en français. « On est juste après le scandale du Watergate, les mensonges de Nixon, qui a démissionné. On est après la guerre du Vietnam, avec les mensonges américains qu’on a révélé sur le déclenchement de la guerre. Bref, il y a une demande de transparence », analyse Thomas Snégaroff.
Pour se différencier des autres, Jimmy Carter décide alors de montrer aux Américains qu’il est comme eux : il opte pour une transparence totale. Un jour, il est contacté par le journal Playboy . On y trouve des photos de femmes nues, mais aussi des articles politiques. « D’ailleurs, il y a plein d'hommes qui disent : "On ne lit que les articles politiques", alors qu’en fait, on regarde aussi les photos des filles nues. Ça, c’est l’ambiance des années 1970 », ajoute Thomas Snégaroff. Jimmy Carter, pourtant très religieux, accepte d'accorder au magazine un entretien.
L’interview avec « Playboy »
Le candidat évoque sa foi, son rapport aux femmes et la sexualité. « Lors d'une réponse, il en vient à dire, parce qu’il veut apparaître comme un type comme les autres, qu’il n’a jamais trompé sa femme, mais qu’il l'a souvent trompée dans son cœur, dans sa tête, parce qu’il a eu du désir pour d’autres femmes sans aller jusqu’au bout », raconte Thomas Snégaroff.
Voyant Jimmy Carter en avance dans les sondages et flairant la bonne histoire, le magazine Playboy décide de sortir l’interview en avance. Au lieu de sortir en octobre comme prévu, l’article est publié le 22 septembre. Il fait scandale. « On se dit : "Mais c’est quoi ce type qui va se confier à un journal de ce type-là ? À dire des choses comme ça sur son intimité ?" Alors qu’il a une image peut-être d’un type normal, mais d’un type religieux qui a une espèce de rigueur morale », rapporte l’historien.
Il s’excuse
L’événement a un vrai impact sur la campagne de Jimmy Carter. Sa cheffe de campagne estime que le combat est perdu d’avance. Au fur et à mesure, il perd son avance dans les sondages. « Ce qui est intéressant, c’est que ça dit aussi qu’à l’époque, au milieu des années 1970, on en était encore à croire en la pureté morale du Président », remarque Thomas Snégaroff.
« Au moment où paraît le journal se tient le second débat entre Carter et Ford. Pendant le débat, Carter se sent obligé d’en parler lui-même. Il doit crever l’abcès. Il dit qu’il n’aurait pas dû donner cette interview, que d’autres politiques ont donné des interviews à "Playboy", mais qu'ils n’étaient pas candidats à la présidence. Bref, il fait acte de contrition, il s’excuse. La campagne va durer encore trois semaines, on va encore beaucoup parler de cette interview. Lui qui avait 15, 16, 17 points d’avance dans les sondages l’emportera finalement d’un cheveu. L’interview à "Playboy" aurait pu lui coûter très cher. »