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Les femmes japonaises victimes de harcèlement maternel
Au Japon, 1 femme enceinte sur 5 est harcelée au travail
Sayaka Osakabe a été mise sous pression par son patron et a fait deux fausses couches. Son histoire a permis de faire la lumière sur l’extrême misogynie du monde du travail nippon.
« Je pense qu'il n'est pas normal que des femmes ne puissent pas avoir d'enfant tout en continuant à travailler dans un pays développé. Le Japon est vraiment très en retard sur ce point », affirme Sayaka Osakabe. Cette ancienne employée se bat contre le harcèlement des femmes au travail après avoir elle-même subi le « matahara », le « harcèlement maternel » en français.
« Selon lui, c'est égoïste de vouloir un travail et un enfant »
En 2012, Sayaka Osakabe tombe enceinte et demande à son patron de ne plus faire d'heures supplémentaires. Celui-ci refuse. « Selon lui, c'est égoïste de vouloir un travail et un enfant, et je devrais choisir entre les deux », explique-t-elle. La salariée refuse de choisir et fait une première fausse couche. Deux ans plus tard, elle retombe enceinte. Son employeur réclame sa démission. Sayaka Osakabe refuse et s’accroche, et elle fait une nouvelle fausse couche.
« J'y pense encore aujourd'hui. Si seulement mon patron n'était pas venu chez moi pour me demander de démissionner… Si j'avais perdu mon enfant en restant à la maison, je pense que j'aurais pu l'accepter. Mais parce que mon patron est venu, j'ai dû aller travailler et à cause de cela, j’ai fait une fausse couche », se souvient la Japonaise.
60 % des Japonaises quittent leur emploi lorsqu'elles tombent enceinte
Sayaka Osakabe a obtenu gain de cause devant la justice et a créé l'association Matahara Net pour aider les femmes victimes de harcèlement. Au Japon, 1 femme enceinte sur 5 serait harcelée au travail et 60 % des Japonaises quittent leur emploi lorsqu'elles tombent enceinte. « Personne de mon bureau ne m'a jamais félicitée d'être enceinte. C'était horrible. Et je connais une femme qui a dû faire des excuses à tous ses collègues parce qu'elle était enceinte », témoigne une employée.
Dans le secteur privé, les femmes n'occupent que 8 % des postes à responsabilités. Et si le gouvernement souhaite faire évoluer les mentalités, ce n’est pas forcément pour les bonnes raisons, d’après, Guibourg Delamotte, maîtresse de conférences à l’Institut national des langues et civilisations orientales : « Il y a une finalité économique. Ce n'est pas par progressisme, par féminisme. »
« Cela nécessite un changement de culture de la part de la société »
Pour faire face au vieillissement de la population, à la faible croissance et au manque de main-d'œuvre, le gouvernement veut en effet ouvrir davantage le marché du travail aux femmes. Mais Emi Omura, avocate japonaise, reste sceptique : « Franchement, je ne peux pas être optimiste parce que cela nécessite un changement de culture de la part de la société. »