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Pendant ce temps-là… – "Mayotte a soif"
Pour résumer, “Mayotte a soif”
Des coupures d’eau dès le midi, des fontaines vides et des habitants révoltés : voici ce que résume le slogan “Mayotte a soif” depuis les premières restrictions en eau fin mai. Une crise qui, selon Iri Nadjib, habitant de Mayotte, touche tout le monde. “On ne va pas faire semblant. À un moment donné, il faut parler et montrer aux autorités justement que la population meurt de soif.” Des coupures d'eau quotidiennes, certaines peuvent durer pendant 48 heures alors que le prix d’un pack d’eau peut atteindre sept euros. Pour Estelle Youssouffa, députée Liot de Mayotte, “cette eau, c'est devenu l'alpha et l'oméga de toute la vie à Mayotte. Et c'est ce qui fait qu'on n'est plus en train de vivre normalement, on survit.”
Cette crise impacte plus que jamais les Mahoraises et les Mahorais au quotidien. “Sortir du travail, ne pas avoir de l'eau pour se laver ni pour faire à manger, c'est très difficile. Toutes les bouteilles sont vides, donc je ne sais pas comment je vais faire pour faire à manger aujourd'hui. La chasse d'eau, je suis obligée de venir soulever et vider l'eau que j'ai pour pouvoir aller aux toilettes. Ce problème, surtout ici dans un quartier qui est habité par une population considérable, et il y a qu'un seul robinet, il y a qu'une seule fontaine qui est dedans, et cette fontaine actuellement est fermée. Et donc il y a tout le monde qui est assis autour pour attendre que l'eau coule. Mais ce n'est pas possible.”, ajoute Laure Chandarana, habitante de Mayotte.
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Une crise de la ressource exceptionnelle
Olivier Brahic, directeur général de l'ARS de Mayotte, explique que le département connaît une crise de la ressource sur l’année 2022-2023 exceptionnellement sèche. Ainsi, les retenues collinaires ne répondent pas aux besoins pour la saison sèche. Le département français connaît sa seconde plus importante sécheresse depuis soixante ans, alors que 80 % de l'eau provient des cours d'eau et de ces retenues collinaires.
Ici, tous les secteurs sont touchés par cette crise. Nicolas Vaillant, infirmier puériculteur, explique : “Je travaille en tant qu'infirmier puériculteur à Mayotte en pédiatrie, au centre hospitalier de Mamoudzou, et là, ça fait 2-3 semaines que c'est une hécatombe. C'est un défilé de bébés tous les jours aux urgences et qui, après, montent dans le service et sont tous déshydratés. Alors, soit ils sont déshydratés parce qu'ils ont attrapé une bactérie qu'ils ont bue dans l'eau, qui n’est pas forcément potable et qui du coup entraîne une gastro, et là ils se déshydratent complètement, ou c'est tout simplement qu'ils ne boivent pas assez. Franchement, aujourd'hui, à l'hôpital, on se pose vraiment beaucoup de questions. Parce qu'avec 7 euros le pack d'eau, je ne vois pas comment certaines familles vont pouvoir rien que faire le biberon du bébé, c'est impossible. Et ça me fait vraiment très peur sur la situation de l'hôpital.” Certaines vidéos postées par des habitants sur les réseaux sociaux montrent une eau boueuse sortant du robinet. C'est ce qu'il peut arriver un court instant après une longue coupure d’eau.
Des services de la préfecture “passifs”
Olivier Brahic, directeur général de l'ARS de Mayotte explique qu’au regard “des recommandations de l'ARS que je vais vous préciser, l'eau est potable et la recommandation de l'Agence régionale de santé est de faire bouillir l'eau dans les premières heures suite à une coupure d'eau. En complément, nous, ARS, on réalise des contrôles de la qualité de l'eau. Et à date, il n'est pas identifié de non-conformité, mais pas de dégradation de l'eau par rapport aux années antérieures.”
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Pour Estelle Youssouffa, “on n'arrive plus à admettre que l'État, les services de la préfecture, soient aussi passifs, et aussi sourds et aveugles aux besoins de la population. Parce qu'il faut comprendre que le système de production d'eau potable aujourd'hui à Mayotte est systémiquement, structurellement déficitaire. À Mayotte, on a des coupures d'eau tous les jours depuis des années. Et là, cette crise est aiguë parce qu'il n'y a pas de pluie. Mais fondamentalement, il n'est pas acceptable qu'un département français ait des coupures d'eau quotidiennes.”
Interpellé fin juin, Gérald Darmanin a assuré un retour à la normale début septembre. “Je pense qu'on peut garantir que chaque Mahorais aura accès à l'eau potable, chaque enfant, à la rentrée de septembre, aura accès à l'eau potable.”, explique-t-il. Fin août, le préfet a annoncé que la situation devrait durer encore plusieurs mois, alors que la saison des pluies n'est pas attendue avant la fin de l'année. Thierry Suquet, préfet de Mayotte explique qu’en “dépit des efforts qui ont été réalisés par les Mahorais sur la consommation d'eau et les économies importantes qui sont réalisées, on s'aperçoit aujourd'hui que les prélèvements qui sont faits dans les retenues collinaires sont trop importants. Nous sommes obligés de prendre de nouvelles mesures. On va donc passer à des tours d'eau plus restrictifs. 48 heures sur l'ensemble du département.”
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