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Pourquoi le plaquage ventral est une pratique dangereuse
C’est quoi, le plaquage ventral ?
Cette technique d’immobilisation dangereuse est interdite dans plusieurs pays mais toujours utilisée en France par les forces de l’ordre. Décryptage.
Le plaquage ventral, supposé à l’origine de la mort de George Floyd aux États-Unis, est actuellement sous le feu des critiques. Cette technique d’immobilisation policière est également questionnée dans la mort du jeune homme français Adama Traoré en 2016 et dans le décès de Cédric Chouviat en janvier 2020 après un contrôle routier. Cette pratique est interdite dans certains pays, mais toujours utilisée par la police française.
« Il y a régulièrement des personnes qui décèdent après des interpellations »
« Il y a régulièrement des personnes qui décèdent après des interpellations, notamment à cause de l'utilisation de techniques d'immobilisation qui présentent des risques d'asphyxie », indique Anne-Sophie Sempéré, chargée de projet à l’ONG Amnesty International.
Elle prend l’exemple de Cédric Chouviat, mort après un plaquage ventral et une clef d'étranglement, et de George Floyd, décédé après un plaquage ventral et une pression sur le cou. « Mais ce ne sont pas les seuls. On pense évidemment à Adama Traoré, Lamine Dieng, Abdelhakim Ajimi », poursuit Anne-Sophie Sempéré.
« Le problème de cette technique, c'est qu'il y a un risque d'asphyxie positionnelle »
Le plaquage ventral, aussi appelé décubitus ventral, consiste à maintenir une personne ventre au sol, tête sur le côté. Les forces de l’ordre peuvent, en plus, menotter les mains, les chevilles, et exercer un poids sur le dos ou le cou.
« Le problème de cette technique, c'est qu'il y a un risque d'asphyxie positionnelle. Le simple fait d'être allongé sur le ventre peut entraîner des difficultés à respirer, aggravées par le fait d'avoir les mains entravées par l'arrière. Encore plus si on supporte le poids d'une ou plusieurs personnes, notamment sur la zone du thorax », explique la chargée de projet chez Amnesty International.
En 2011, des médecins suisses relevaient des cas de « mort subite »
Par ailleurs, quand une personne étouffe, elle a tendance à se débattre, ce qui peut pousser les policiers à accroître la pression. « On est dans un cercle vicieux où il y a un risque létal, un risque de mort », ajoute Anne-Sophie Sempéré. En 2011, dans la Revue Médicale Suisse, des médecins suisses alertaient en effet sur la dangerosité de cette technique et relevaient des cas de « mort subite ».
En 2016, maintenu dans cette position, Adama Traoré est décédé lors de son interpellation. En 2017 par ailleurs, la France a été condamnée par la Commission européenne des droits humains pour le décès de Mohamed Saoud, qui avait été maintenu au sol pendant 35 minutes.
« Il y a plusieurs pays qui ont interdit le plaquage ventral. La Suisse, la Belgique, certaines villes aux États-Unis comme Los Angeles. En Suisse, ça a été interdit en 2001 après le décès d'un réfugié nigérien qui se faisait renvoyer dans son pays et qui a subi une technique d'immobilisation qui l'a asphyxié », note Anne-Sophie Sempéré.
« Des policiers finissent par exercer des plaquages ventraux sur des personnes maîtrisées »
D’après les forces de l’ordre toutefois, il est parfois inévitable d’amener temporairement une personne sur le ventre pour lui passer les menottes. Mais cette position doit être limitée dans le temps. Pendant le confinement, Amnesty International a étudié des vidéos d'usage illégal de la force par des policier. « Dans un grand nombre de vidéos, des policiers, sur un simple contrôle de confinement, finissaient par exercer des plaquages ventraux sur des personnes maîtrisées. Ils se prolongeaient. Et plus ça se prolonge, plus le risque d'asphyxie augmente », s’insurge Anne-Sophie Sempéré.
En janvier 2020, une proposition de loi a été déposée à l’Assemblée nationale pour interdire ces deux techniques. D’autant que d'autres méthodes d'interpellation et d'immobilisation existent. « L'enjeu, c'est que certes, la police a le droit d'utiliser la force, mais elle doit l'utiliser en dernier recours. Il y a quelque chose qui doit absolument être développé, ce sont les autres options, et donc la communication ou le dialogue, pour que les personnes obtempèrent sans avoir à utiliser la force, assure Anne-Sophie Sempéré. Et là-dessus, on a un vrai problème en France. »