Quand un acteur est mis dans une case, comment peut-il en sortir ?

"J'étais un peu dans le rôle du débile pendant longtemps, jusqu'à ce que je fasse une série et soudain j'ai eu un peu mes lettres de noblesse [...] mais avant ça, j'étais un gogol." Dans le film "Les inséparables", Ana Girardot et Éric Judor prêtent leur voix à des marionnettes coincées dans des rôles stéréotypés. Notre journaliste Cécile Guthleben leur a demandé si ça leur était déjà arrivé.
Publié le
12/12/2023
Contenu en partenariat avec une marque

J'étais un peu dans le rôle du débile, pendant longtemps, jusqu'à ce que je fasse une série pour Canal, qui s'appelle Platane, et soudain, j'ai eu un peu mes lettres de noblesse, le "comique un peu malin”. Mais avant ça, j'étais un gogol. J'étais La Tour Montparnasse infernale, Les Mots, H, le débile, tu vois. On s'est dit: “Ah putain, il a un cerveau, en fait”” explique Éric Judor. Avec Ana Girardot, il ont prêté leur voix à des personnages stéréotypés du film “Les inséparables”. L’occasion de revenir sur la notion de stéréotype. Ana Girardot explique aussi avoir pu être enfermée dans des cases : “Je pense que ça arrive à beaucoup d'acteurs et d'actrices, à un moment donné, d'être connotés dans un certain type de rôle et que notre bataille, c’est aussi de dire : non, on est acteur, on peut faire plein de choses différentes”. 

Ana Girardot raconte ses scènes de sexe pour ‘La Maison’


“Un jour, j'ai dit à mon agent : "Je ne veux plus faire les femmes de”“


Elle déclare aussi que “c'est compliqué de réussir à faire ce virage”. Ana Girardot confie avoir été beaucoup mise dans la case de “la femme de” : “A un moment donné, je me suis dit: attends, j'ai eu beaucoup de maris. J'ai eu 22 enfants... Un jour, j'ai dit à mon agent : "Je ne veux plus faire les femmes de.” Je ne regrette rien. Mais je me suis dit : "J'ai envie de sortir de ça." Et puis j'ai eu la chance aussi d'avoir des réalisateurs, des réalisatrices qui d'un coup te disent : "On ne t'a jamais vue là-dedans, mais moi, j'ai envie de le faire”. C'est-à-dire qu'il faut qu'il y ait des personnes qui te fassent confiance”. 

Cannes 2023 : Éric et Ramzy avec Augustin Trapenard


“Ils m'ont dit: "Quoi ? C'est le gogol, là, qui veut faire ça?" Ils ne comprenaient pas”


Éric Judor lui explique avoir réussi à casser l’image qu’on lui avait collée “en forçant des portes” : “Platane, j'ai mis une bonne année et demie à convaincre Canal de le faire. Et quand j'ai appelé les acteurs pour venir sur ma série, ils m'ont dit: "Quoi ? C'est le gogol, là, qui veut faire ça?" Ils ne comprenaient pas entre les textes qu'ils lisaient et ce que j'avais fait jusqu'à présent. Et la première personne qui m'a fait confiance, c'est Monica Bellucci, qui s'est dit: "Bon allez, vas-y, on va essayer quand même le petit gars, on va tenter”. Et heureusement, après, tout le monde a dit "oui””. 

Anatomie d'une scène avec Olivier Nakache et Éric Toledano


Un autre acteur qui a décidé d’arrêter d’accepter le même type de rôle qui lui était proposé est Matthew McConaughey. Quand il a décidé d'arrêter de jouer les beaux mecs torse nu, il n'a plus rien tourné pendant près de trois ans. Il a eu peur d'être tellement oublié que son téléphone ne résonne plus jamais. Une peur qui existe mais qu’il faut dompter selon Ana Girardot : “C'est un métier qui est beaucoup basé sur le désir. Le désir des gens qui veulent travailler avec toi et du public, aussi, qui a envie de te voir jouer ce rôle. Donc oui, tu peux avoir cette peur, tout d'un coup, qu'on n'ait plus envie de toi. Mais le risque aussi, c'est, on en ait marre que tu fasses exactement la même chose à chaque fois pendant dix ans”. 

Discussion avec Valérie Donzelli et Eric Reinhardt