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3 moments qui ont changé la vie de Thomas Pesquet
Trois moments qui ont changé la vie de Thomas Pesquet
Brut a rencontré le spationaute Thomas Pesquet, qui parle de son parcours et de son combat pour l’écologie.
Son décollage pour l’ISS
On s'installe, on monte, on dit au revoir à sa famille, à ses amis. C'est un moment super émouvant parce qu'on ne sait pas si on va les revoir. On essaie de se dire tout ce qu'on a à se dire. On dit au revoir à tout le monde sur les marches de la fusée et puis, on monte dans le petit ascenseur. Et puis, on monte, on monte, on monte, on monte... Et là, grand silence. Il y a la fusée qui fume, qui vibre un peu, c'est un peu bizarre. Cet ascenseur, j'avais l'impression qu'il n'avait pas de fin. On rentre à l’intérieur, et là, ça ressemble un peu à un sous-marin.
On est vraiment enfermés, on ferme les grosses écoutilles en fer sur nous. On est attachés de partout, on ne peut même plus bouger. On est ligotés. Ça n'a rien à voir avec un avion. On attend le décompte final, et puis, jusqu'à ce que la fusée prenne feu, c'est le tour de manège ultime. Ça dure 8,48 minutes. Ensuite, on arrive en orbite, et là, on regarde pour la première fois par la fenêtre et on voit le jour qui se lève et les îles du Pacifique. Et on se dit : « Ça y est, je suis dans l’espace. »
Sa première sortie spatiale
La sortie dans l'espace, c'est un peu le rêve dans le rêve. C'est la poupée russe du vol spatial. Ça prend énormément de temps et d'efforts de tout préparer. On va sortir, on va se confronter aux éléments, aux changements thermiques, +100 degrés au soleil, -100 degrés à l'ombre... C'est l'environnement le plus hostile qu'on puisse imaginer pour l’humain. Nous, on va aller se confronter à ça. Avec 400 kilomètres de vide sous les chaussettes ! Mais une fois qu'on apprivoise tout ça, au bout de quelque temps, ça devient naturel. Quand on a un peu de temps et qu'on peut se dégager les mains du travail, on prend des photos et on regarde la Terre. Et là, on se fait des souvenirs pour la vie.
On a l'impression que c'est une énorme boule qui défile sous les pieds. Ça passe du désert à la mer. C'est assez spectaculaire. Ça laisse des souvenirs... Et les passages jour-nuit aussi, on voit la Terre, et puis tout d'un coup, on passe du côté obscur. Paf, c'est comme si tout le monde éteignait les lumières. Et là, on voit plus rien. On voit plus qu'à deux mètres avec les lampes du casque. Il y a moyen de se perdre autour de la station spatiale... C'est des choses qu'on ne peut même pas simuler sur Terre.
Sa prise de conscience écologique
Après un voyage dans l'espace, les gens sont différents. Ils ont pris un recul qu'on ne sait pas prendre sur la Terre. L'être humain n'est pas fait pour raisonner à de grandes échelles. On n'est pas câblés pour ça. Ça ne nous parle pas parce qu’on ne peut pas le toucher, parce qu’on ne peut pas le voir, parce qu'on ne peut pas le ressentir. On peut dire : « Oui, la température augmente de 2 degrés en tant d’années, c'est pas bien. » Mais quelque part, on n'a pas de moyens de l'expérimenter nous-mêmes.
Alors que lorsqu’on va dans l'espace, c'est tout bête, mais on prend le recul nécessaire pour mettre la Terre à l'échelle dont on peut faire l'expérience avec ses sens. On peut voir les choses, on peut voir le changement climatique. Tout d'un coup, cette chose qui nous paraissait infinie, dont on ne voyait pas les limites quand on était sur Terre, ça devient très petit, très borné. La Terre, c'est ni plus ni moins qu'un gros vaisseau spatial avec un équipage de quelques milliards d'individus. C'est le même principe. Nous, on est dans notre petit vaisseau fragile, un environnement hyper hostile avec des ressources limitées. Il faut bien s'en occuper pour que le voyage dure le plus longtemps possible. La Terre, c'est exactement pareil, sauf qu'on n'a pas compris.
C'est bête qu'il faille aller dans l'espace pour le comprendre. Mais quand on a compris ça, il y a des choses qui paraissent évidentes. On sait qu'il faut tout faire pour la protéger. D'un côté, j'ai ressenti de l'inquiétude. Mais de l’un autre, ça m'a aussi prouvé que l'être humain est capable de faire des choses absolument incroyables.