Les nouvelles technologies nous rendent-elles plus bĂȘtes ?

đŸ“±Et si l'usage intensif des smartphones et d'internet nous rendait en fait plus bĂȘtes ? Pour Nawal Abboub, docteure en sciences cognitives, c’est tout l’inverse. VoilĂ  pourquoi.
Publié le
4/6/2019
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Non, les technologies, ça ne rend pas idiot. C'est bien l'inverse.


Nawal Abboub, Docteure en sciences cognitives : À l'arrivĂ©e du numĂ©rique, on a eu exactement les mĂȘmes choses qu'on a eues quand il y a eu l'arrivĂ©e des livres et des Ă©crits. Ils se sont dit: "Mais les humains ne vont plus avoir de mĂ©moire parce que tout sera stockĂ© dans les livres." Et c'est drĂŽle, parce que quand on reprend les Ă©crits de Victor Hugo, on se retrouve exactement avec les mĂȘmes formulations de phrases. Et finalement, est-ce que les livres, ça a enlevĂ© des parties de notre cerveau et personne n'est capable de mĂ©moriser ? On voit bien que ce n'est pas le cas. Elles nous permettent justement de savoir oĂč aller chercher l'information quand j'en ai besoin et pas tout stocker de maniĂšre... comme si on mettait toute la bibliothĂšque dans mon cerveau mais non, savoir finalement une information, c'est savoir oĂč aller la chercher. Et les smartphones, nos Ă©crans, le numĂ©rique, nous permettent justement de maximiser nos sources d'information. Et de se dire: "Ah, je cherche ça." Et trĂšs rapidement, tac tac, je me mets sur mon tĂ©lĂ©phone, je tape ce qu'il faut et ça me donne la rĂ©ponse. Alors le numĂ©rique, ce que ça peut nous apporter en plus du livre, c'est d'autres stratĂ©gies d'apprentissage. C'est d'autres sources d'information, d'autres sources de stockage et mĂȘme, on s'est rendu compte, il y a des recherches qui ont montrĂ© que les gens qui Ă©taient habituĂ©s Ă  faire beaucoup de recherches justement sur Internet, augmentaient leurs capacitĂ©s de sĂ©lection d'information. Ça veut dire inhiber la stratĂ©gie qui n'est pas la plus pertinente et aller chercher celle qui est la plus pertinente. Donc on doit mettre de cĂŽtĂ© quelque chose et aller chercher quelque chose d'autre. Et cette compĂ©tence-lĂ , c'est ce qu'on appelle un peu la flexibilitĂ© mentale. C'est de pouvoir s'adapter Ă  diffĂ©rentes choses en fonction des contextes. On doit de plus en plus s'adapter, de plus en plus sĂ©lectionner de l'information et donc, ça renforce les compĂ©tences si on est bien guidĂ© justement pour faire ça. Alors, est-ce qu'il y a des modifications cĂ©rĂ©brales derriĂšre, des modifications de neurones? Ça, on ne le sait pas encore parce qu'on n'a pas encore le recul nĂ©cessaire pour comprendre comment 10 ans, 20 ans d'usage, ça va modifier vraiment, structurellement, des choses dans notre cerveau. Ce qu'on sait, par contre, c'est que dĂšs lors qu'on va utiliser quelque chose de nouveau, ça va changer. Il va y avoir des micro-changements au niveau de nos neurones. C'est ça en fait, la plasticitĂ© cĂ©rĂ©brale. C'est le fait que, justement, nos neurones se modulent, se modifient en fonction de notre environnement et des nouvelles choses qu'on fait dans la vie de tous les jours.


DĂ©sormais, avec les smartphones, notre cerveau peut ĂȘtre sollicitĂ© Ă  tout moment par des notifications. On s'est rendu compte que la notification, ça fait appel Ă  notre systĂšme d'alerte. DĂšs qu'il y a quelque chose qui est saillant, une lumiĂšre, oĂč il y a un son qui change, oĂč il y a qui va aller attirer mon attention, hop! Ça va aller consommer de l'Ă©nergie. Et plus on va avoir des notifications, plus on va consommer de l'Ă©nergie mentale. Et ça, ce que ça provoque, ça provoque de la fatigue Ă  long terme. D'ailleurs, mĂȘme sur la journĂ©e, on le ressent. À 15h, quand on a passĂ© sa matinĂ©e sur son tĂ©lĂ©phone, on se sent fatiguĂ©. Et donc la comparaison qu'on peut faire entre ceux qui sont tout le temps sur leur tĂ©lĂ©phone, comme on peut se rendre compte parfois, que ça soit les adolescents ou les jeunes actifs, par rapport Ă  ceux qui ont moins eu l'habitude d'avoir ces tĂ©lĂ©phones dans les mains, ou d'autres, comme les personnes ĂągĂ©es eh bien ça, ça a un changement sur, justement, leurs ressources attentionnelles. que les jeunes Et on se rend compte peuvent ĂȘtre plus fatiguĂ©s Ă  cause de l'usage excessif, Ă  cause des notifications que, justement, les personnes qui ont moins l'habitude d'utiliser ces outils. L'outil pour recharger ses batteries, par exemple, ça serait de prendre un cafĂ© avec ses amis, d'aller discuter du dernier Ă©pisode de Game of Thrones, de faire un tour dans le parc ou dans le bois Ă  cĂŽtĂ© de chez soi. VoilĂ  ce que c'est, une pause qui permet de recharger nos ressources mentales. Avec l'usage de nos tĂ©lĂ©phones, parfois, on ne prend pas assez soin justement, de son cerveau. GrĂące aux nouvelles avancĂ©es qu'on a pu faire en science, on a vu Ă  quel point il faut y faire attention et les pauses sociales, c'est essentiel, justement pour faire ça.