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Un projet de centrale solaire en Amazonie divise la Guyane

"Regardez ce que vous faites à la forêt, vous n'avez pas honte ?" Sacrifier une partie de l'Amazonie pour construire une centrale solaire, c'est le projet qui divise la Guyane. Pour les autochtones et militants qui bloquent le chantier, d'autres solutions sont possibles…
Publié le
07
/
03
/
2023

La forêt pleure à cause de vous!


On a bloqué le chantier. On est désolés d’en arriver là mais c’est plus possible” explique un manifestant. “Regardez ce que vous faites à la forêt? Vous n’avez pas honte?” crie un autre. En Guyane, dans le nord du pays, un projet de centrale électrique solaire est actuellement bloqué par les habitants du village voisin français de Prospérité, épaulé par des militants venus de l'hexagone. Cette situation est révélatrice d’un défi difficile à résoudre pour la Guyane: passer à l'énergie verte tout en préservant l'Amazonie et les terres autochtones.

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On nous fait passer pour les méchants qui veulent cramer la forêt. La réalité factuelle et objective, c'est que nous sommes dans des territoires européens, pas que français, les plus en avance en matière de développement des énergies renouvelables, mais que, malheureusement, 98% du territoire guyanais est recouvert par de la forêt, dont 94 % par de la forêt primaire, donc on n'a pas d'autre choix que de défricher des équipements lorsqu’on veut faire des équipements structurants” affirme Thibault Lechat-Vega, 3e vice-président de la collectivité territoriale de Guyane.  


Ce n'est pas le seul projet de déforestation

En fait, aujourd'hui encore, la Guyane utilise beaucoup le gaz et le diesel pour faire de l'électricité. Ces énergies représentaient 49 % de la production totale en 2019, contre 10 % sur cette même période en métropole. Pour remédier à ça, la solution des autorités est de remiser sur un passage au 100 % renouvelable d'ici 2030 en développant plusieurs projets. Mais certains se heurtent à des oppositions. 

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Ce n'est pas le seul projet de déforestation. On a eu les projets de biomasse, c'est-à-dire couper de la forêt, brûler des arbres, en faire de la biomasse. Même un barrage hydraulique a un fort impact sur l'environnement puisque là, c'est 370 km2 de terres qui ont été ennoyées, qui ont rejeté énormément de méthane pendant la mise en eau, c'était, pendant les premières années, plus de 50 % des émissions de la Guyane” indique Florent Perugini, conseiller en énergie à l'université de Guyane. 

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A un moment où il est à la mode de parler du réchauffement climatique et de la préservation des espaces forestiers, on observe qu'en Guyane, qui représente 50 % de la biodiversité française, on a encore ce genre de projets qui n'ont aucun sens. La Guyane, ça fait la taille du Portugal, c'est pas l'espace qui manque, on parle là que de 78 hectares” ajoute Yanuwana Pierrenature, autochtone de Guyane. 

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“Un Guyanais sur huit n'est pas raccordé au réseau électrique”

Nous comprenons ces revendications, mais nous entendons aussi les revendications de l'ensemble de la population guyanaise, y compris les populations autochtones, qui demandent d'avoir des conditions de vie dignes, et ça commence par avoir l'électricité. Un Guyanais sur huit n'est pas raccordé au réseau électrique. Aujourd'hui, près d’une personne sur deux ne vit que des minima sociaux, donc ça veut dire qu'il faut créer de l'activité économique, mais qui dit du développement économique dit de la consommation énergétique” répond Thibault Lechat-Vega.

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Ces projets renouvelables promettent une énergie locale et bien meilleure pour le climat que le diesel ou le gaz, largement utilisés aujourd'hui. Mais ça demande plus de place. Il faut mettre les panneaux solaires quelque part, construire des barrages ou trouver des emplacements pour faire pousser des plantes pour l'agrocarburant ou la biomasse.


“Il faut économiser l'énergie avant de la produire”

Ce n'est pas la place qui manque, ici, en Guyane. Par exemple, il y a des forêts dégradées Il y a des maisons qui poussent comme des champignons dans l'ouest guyanais, pourquoi ne pas mettre des panneaux solaires sur les toits ?” affirme Roland Sjabere, Chef coutumier du village Prospérité. “Il y a un besoin en énergie et en électricité en Guyane, on n’est pas contre, mais on est contre le fait de perdre de la forêt pour que ce genre de choses se fassent” ajoute Yanuwana Pierrenature, autochtone de Guyane. 

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En plus, la Guyane ne peut pas miser sur certaines alternatives utilisées en métropole. Isolée par la mer à l'est et par la forêt amazonienne au nord, au sud et à l'ouest, elle ne peut pas compter sur ses voisins quand il s'agit d'énergie. Et avec seulement 300 000 habitants, dont certains très éloignés, elle ne peut pas non plus miser sur le nucléaire. Alors, quelles sont les alternatives? 


Il faut économiser l'énergie avant de la produire, ça coûte beaucoup moins cher, déjà. 90 %, pour certains bâtiments, de l'électricité consommée, c'est l'usage de la climatisation. Il y a aussi des moyens de plus petite production, des unités sur des toitures ou alors sur des parkings qui vont produire, injecter directement l'énergie dans le réseau” préconise Florent Perugini, conseiller en énergie à l'université de Guyane. 

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