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Une vie : Louisa May Alcott

"Aucune fille ne pouvait être mon amie si elle refusait de grimper aux arbres" Elle a inspiré des générations de lectrices avec "Les Quatre Filles du docteur March". Pionnière féministe, abolitionniste... Voici l'histoire de Louisa May Alcott.
Publié le
30
/
01
/
2020

Louisa May Alcott, génie de la littérature


Elle a écrit le roman culte et féministe Les Quatre Filles du docteur March, plusieurs fois adapté à l’écran par Hollywood. Retour sur la carrière d’une artiste engagée et avant-gardiste.


Les Quatre Filles du docteur March a inspiré des générations de lecteurs, mais l’autrice derrière le livre est tout aussi inspirante. Pionnière féministe, abolitionniste, l’une des premières étoiles littéraires féminines américaines… C'est Louisa May Alcott. « J'ai découvert cette femme si en avance sur son temps, si fascinante et dont la vie en elle-même était déjà si hors du commun », se souvient la réalisatrice Greta Gerwig, qui a adapté au cinéma Les Quatre Filles du docteur March. Son film est sorti en janvier 2020.


Une enfance très pauvre


 
Née en 1832 en Pennsylvanie, Louisa May Alcott grandit dans le Massachusetts. Elle est la deuxième d’une fratrie de quatre sœurs. Dès le plus jeune âge, elle voit de quelle manière la société limite l'indépendance des femmes. « Ce n'est pas seulement le fait qu'elles ne pouvaient pas voter. Ce n'est pas seulement le fait qu'elles n'avaient pas d'emploi. Elles ne possédaient rien… Même pas leurs enfants », décrypte Greta Gerwig.


Son père est un philosophe excentrique qui présente ses filles à des écrivains célèbres, comme Nathaniel Hawthorne et Henry David Thoreau. Il n’arrive pas à subvenir aux besoins de sa famille,  ce qui oblige les femmes à travailler dans l’enseignement, la couture et le ménage pour gagner leur vie. Louisa et ses soeurs se nourrissent régulièrement de pain et d’eau et déménagent plus de 30 fois pendant leur enfance.


Elles rejettent les jeux destinés aux filles. « Aucun garçon ne pouvait être mon ami tant que je ne l'avais pas battu dans une course, et aucune fille ne pouvait être mon amie si elle refusait de grimper aux arbres, de sauter par dessus les barrières… » raconte d’ailleurs Louisa May Alcott dans son livre autobiographique Sketch of Childhood.


Infirmière pendant la guerre de Sécession


 
Elle commence à écrire à l'âge de 8 ans et monte des pièces de théâtre avec ses sœurs. À 15 ans, elle se fait la promesse de sortir un jour sa famille de la pauvreté. Elle n’a qu’une vingtaine d’années quand elle commence à publier des histoires sous un pseudonyme pour gagner plus d’argent. À 25 ans, sa sœur cadette Elizabeth décède d'une maladie inconnue.


Abolitionniste de longue date, elle rentre comme infirmière pendant la guerre de Sécession et soigne des soldats blessés de la bataille de Fredericksburg. Louisa May Alcott raconte son expérience dans le livre Hopital Sketches.


À 35 ans, elle se rend chez un éditeur, qui lui demande de penser à une « histoire de filles ». Elle écrit alors un livre en trois mois, passant parfois 14 heures par jour à son bureau. Elle signe Les Quatre Filles du docteur March, un des premiers romans mettant en scène des femmes indépendantes et imparfaites. On y découvre le personnage prinicpal de Jo March, fille forte et charismatique.


Le succès fulgurant des Quatre Filles du docteur March


 
« C’est Jo March qui m’a poussée à devenir écrivaine, affirme Greta Gerwig. C’est grâce à elle que j’ai pu m’accepter telle que je suis. Et en lisant le livre, alors que j’étais adulte, j’ai pris en pleine figure tous ces thèmes qui me paraissaient si pressants et urgents. On y parlait des femmes et de leur rapport au fait de devenir autrice et propriétaire, ainsi qu’à l’ambition et à l’art. » Deux semaines après sa publication, la première édition du livre est en rupture de stock. Les fans demandent plusieurs suites au roman. 


L’actrice Saoirse Ronan, qui joue Jo March dans l’adaptation de Greta Gerwig, qualifie ce livre de « révolutionnaire ». « Elle était célibataire, elle ne s’est jamais mariée, et elle y parle beaucoup de ses soeurs. Et on lui a dit qu’il fallait qu’elle se marie afin de remporter un plus grand succès commercial. Je trouve l’histoire de Louisa très moderne, encore plus que celle de Jo. Elle s’y connaissait en droits d’auteur, elle savait comment les réclamer. »
 
Si l’éditeur de Louisa May Alcott ne la paie pas immédiatement pour son travail, l'écrivaine gagne tellement d’argent en droits d’auteur qu’elle parvient à subvenir aux besoins de toute sa famille et à être indépendante jusqu’à la fin de sa vie. « Je préfère rester vieille fille et bien mener ma barque », affirme-telle d’ailleurs dans son journal, publié en 1860.
 


Féministe avant l’heure


En 1879, sa plus jeune soeur, May, meurt, et elle recueille sa fille. Dans les années 1870 et 1880, l’autrice milite pour les droits des femmes. Quand le Massachusetts vote une loi octroyant le droit de vote aux femmes, elle est la première dans sa ville à s’inscrire sur les listes électorales.
 
Pendant des dizaines d’années, elle souffre de problèmes chroniques de santé, dont des maux de tête, des vertiges et des rhumatismes. En 1888, elle est victime d’un AVC et meurt à 55 ans. Elle est enterrée dans le même cimetière que les grands noms de la littérature avec lesquels elle a grandi.