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Victime d'inceste, Eugénie témoigne

"Je suis sortie de ma chambre, honteuse, j'avais l'impression d'avoir fait une bêtise. Ma mère m'a demandé de ne pas en parler." Enfant, Eugénie a été victime d'inceste. Aujourd'hui, elle a décidé d'en parler.
Publié le
13
/
01
/
2021

Le témoignage d’Eugénie, victime d’inceste


Enfant, Eugénie a été victime d’actes incestueux provoqués par son grand frère, lui-même à l’aube de l’adolescence. Pour Brut, elle raconte son histoire, sa reconstruction et sa volonté de briser un tabou.


Un événement passé sous silence


De ses 5 à 8 ans, Eugénie a subi des gestes incestueux de la part de son grand frère, alors âgé de 6 ans de plus qu’elle.
Un jour, la mère d’Eugénie a surpris un acte, mais n’a préféré pas réagir, refermer la porte. Eugénie se souvient alors d’un sentiment de honte, de culpabilité : “J’avais l'impression moi d'avoir fait une bêtise.
Sa mère lui demande finalement de garder le secret.


Une difficile construction en tant qu’adulte


Eugénie explique avoir eu beaucoup de difficultés à se construire en tant qu’adulte et femme, et plus particulièrement à avoir une relation saine à sa sexualité.
On va forcément vers des gens qui nous font du mal, vers des gens qui nous abusent, puisqu’on a été abusé une fois et qu’on ne nous a jamais dit que ce n’était pas normal” décrit la jeune femme.


Eugénie affirme avoir connu plusieurs schémas et comportements d’auto-destruction, par des moyens divers, alcool, drogues...Construire une relation stable est particulièrement complexe, même si la jeune femme se sent enfin heureuse depuis un an et demi avec son partenaire.
C’est la première fois de ma vie que ça m’arrive, que je m'autorise, moi, à être aimée pour ce que je suis vraiment et pas pour ce que je crois que je suis.” avoue-t-elle.


“Mon frère, à l’époque, était un enfant”


Eugénie souhaite nuancer la responsabilité de son grand frère, à l’époque encore enfant. Elle déplore l’erreur des adultes autour d’eux : “S’il est bourreau, c'est qu'on ne lui a pas expliqué qu’il devait pas faire ça donc il y a déjà un manquement de l’entourage à ce niveau-là


Elle estime qu’une prise en charge aurait été nécéssaire : “Il aurait pu être jugé et être blâmé pour ce qu’il avait fait mais je pense qu’il aurait eu besoin d’un accompagnement derrière. Parce que ça s’est arrêté mais ça aurait pu, aussi, ne pas s’arrêter
Ce n’est qu’une fois adulte qu’Eugénie a pu trouver une psychologue à l’écoute, affronter son histoire, être reconnue en tant que victime d’inceste.


Le tabou de l’inceste aujourd’hui


Au-delà des faits qui sont terribles, je trouve que le pire dans l’inceste, c’est tout le traitement qu’il y a après” déclare Eugénie.


Elle déplore un malaise ressenti auprès des proches, mais aussi au sein de la société qui n’offre pas un espace libre pour en parler. “Pourquoi je devrais me sentir gênée d’en parler ? Pourquoi je devrais me sentir gênée de l’avoir vécu alors que c’est pas de ma faute ?” demande la jeune femme.


Guérir


“* Il faut prendre le problème à bras le corps. Il ne faut pas le fuir*”, conseille Eugénie, convaincue qu'il est possible de travailler sur le traumatisme et de développer des relations saines, malgré les difficultés.


Et moi, j’ai été pendant très longtemps dans la colère à me dire : 'Mais non, ce n'est pas à moi de faire un travail sur moi-même, on m’a fait du mal, il faut que ce soient les gens qui réparent ! ' Puis tout a changé le jour où j’ai compris qu’il fallait que ça vienne aussi de moi et que moi j’ai eu envie aussi de guérir de ça”, conclut la jeune femme.