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Laissé pour mort sur un terrain de foot pour sa couleur de peau : Kerfalla Sissoko témoigne

🇬🇳 "Je suis au sol, en train de mourir, et l'arbitre me sort un carton rouge…" Poursuivi par des supporters et des joueurs, lynché après avoir reçu des insultes racistes, il a été laissé pour mort sur le terrain. Kerfalla Sissoko raconte cette journée du 6 mai 2018 qui a bouleversé sa vie.
Publié le
13
/
06
/
2024

Kerfalla Sissoko, un ancien joueur amateur de l'AS Benfeld, raconte comment le 6 mai 2018, une simple partie de football entre amis a pris une tournure tragique. "C'était une journée tranquille: aller jouer avec ses amis... Parce que dans l'équipe, on était tous des potes", explique-t-il. Cependant, pendant le match au stade de Mackenheim, les choses ont dégénéré. "Je me faisais traiter par 'Sale nègre', 'retourne dans ta brousse', 'tu n'es pas chez toi ici'... Tous les mots qui peuvent exister, à caractère raciste", mentionne Sissoko.

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Une agression violente et raciste


La situation s'est envenimée lorsqu'un coéquipier de Sissoko a été violemment taclé par un adversaire. En essayant d'intervenir, Sissoko a été pris à partie par de nombreuses personnes. "On commence à me tapper moi aussi. Je me retourne et je vois qu’il y a beaucoup de personnes contre moi. Le seul geste que je peux faire, c'est de prendre ma main comme ça, me protéger, balancer mes crampons de gauche à droite pour me protéger", décrit-il. Alors qu'il tentait de s'échapper, un individu est entré sur le terrain avec un couteau. "Quand j'ai vu le couteau, je me suis dit : 'Ma vie s'arrête aujourd'hui, c'est fini pour moi'", confie Sissoko. Il a été attrapé, frappé et a perdu connaissance.

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Les séquelles physiques et psychologiques


À son réveil à l'hôpital, Kerfalla Sissoko ne savait pas ce qui s'était passé. Les examens ont révélé un traumatisme crânien, des côtes cassées et une mâchoire déplacée. Jean-Michel Dietrich, président de l’AS Benfeld et témoin de la scène, se souvient du "bruit d'un os qui se brise" et des "cris d'un homme à l'agonie". Malgré sa volonté de remonter sur les terrains, Sissoko n'a pas pu surmonter ses peurs. "Je voyais encore le passé qui venait sur moi, en fait. Et mes pieds tremblaient. Je ne partais plus aux chocs, je n’étais plus sur le terrain. Je regardais à gauche, à droite. Je ne me voyais plus concentré", raconte-t-il.

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Le pire reste peut-être l'attitude de l'arbitre qui, au lieu d'intervenir, a sorti un carton rouge à Sissoko alors qu'il gisait inconscient sur la pelouse. "Ça fait des années que je suis au foot en amateur, et je n’ai jamais eu de carton rouge. Je suis au sol, en train de mourir, et l'arbitre me sort un carton rouge... En fait, le carton rouge, c'était pour m'accompagner dans ma tombe", dénonce Sissoko. Les agresseurs du joueur de foot n’ont pas été condamnés par la justice. Il habite “à quelques kilomètres” de ses agresseurs précise Mohamed Bouhafsi, coréalisateur du documentaire “Des cris dans le stade”.


“Ce qui a entraîné la naissance de ce documentaire, c'est une discussion avec un très grand joueur de l'équipe de France, un joueur qui joue dans un grand club. Un jour, on se parlait, on prenait des nouvelles et on discutait pendant une demi-heure ensemble, et à la fin de l'entretien, on parle d'un élément raciste. On parlait d'une séquence raciste autour de Vinicius Junior. Et à la fin de l'échange, il me dit: "Tu sais, Mohamed, quand je marque un but, quand je réalise un grand match, quand j'obtiens un penalty, je suis un grand joueur, je suis français, je suis un grand joueur. Et quand je rate un match, quand j'entraîne un penalty, quand je prends un carton rouge, quand je fais des mauvaises passes, quand je suis nul, je redeviens un noir"” se rappelle le coréalisateur.


“Si on met un coup dans la rue, bam, on prend quoi? Du sursis et on se dit qu'on peut aller en prison. Dans le terrain de football, on se dit : c'est pas grave. Et c'est là aussi: si les règles ne sont pas accentuées, si les sanctions ne sont pas aggravées, le samedi et dimanche dans nos terrains de football amateur, il y aura de la violence. Et en plus de ça, des présidents de football ou des présidents de district je ne veux pas de vagues, je ne veux pas augmenter les statistiques de mon département ou de ma région. Donc on va mettre ça sous le tapis, Mais non!” conclut Mohamed Bouhafsi.

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