"En dépit des investigations menées, de la forte médiatisation de l'affaire, des réunions et des communications organisées, il reste toujours possible (...) que certaines victimes n'aient pu, encore, être identifiées", a indiqué le parquet général.
Le parquet de Lorient a ouvert cette nouvelle enquête préliminaire pour "agressions sexuelles et viols, sachant que (ces qualifications) seront affinées selon chaque situation au vu des éléments établis", a-t-il précisé.
L’ouverture du procès de Joël Le Scouarnec
Jugé à Vannes depuis le 24 février par la cour criminelle du Morbihan, Joël Le Scouarnec, 74 ans, écrivait minutieusement dans des fichiers le récit des violences sexuelles infligées à ses victimes, majoritairement mineures, dont il indiquait souvent le nom, le prénom et l'âge.
Les enquêteurs de la section de recherches de la gendarmerie de Poitiers (Vienne) - qui est saisie de cette deuxième enquête - ont, grâce à ce matériel, retrouvé quelque 300 victimes.
Mais de nombreux autres noms apparaissent dans ces "carnets" et ces personnes n'ont pas été retrouvées par les enquêteurs.
"Certaines n'ont pu, encore, être identifiées, auditionnées, ont refusé de l'être, ne se sont pas manifestées, soit à l'étranger ou dans une autre situation d'empêchement", a expliqué le parquet général.
"Oubliée"
"On ne s'opposera pas à ce que M. Le Scouarnec soit entendu pour cette nouvelle enquête", a déclaré à l'AFP l'un des avocats de l'ex-chirurgien viscéral, Me Thibaut Kurzawa.
M. Le Scouarnec est "dans une démarche où il ne peut pas exclure l'existence" de victimes non identifiées, sans pour autant l'"admettre" d'emblée, a-t-il précisé.
S'il est convoqué dans le cadre de l'enquête "il se pliera à cet exercice", a renchéri auprès de l'AFP son confrère Me Maxime Tessier, rappelant que leur client reste "présumé innocent".
"Je guettais l'opportunité" : Le Scouarnec décrit le mode opératoire des viols sur son entourage
M. Le Scouarnec, déjà condamné à 15 ans de prison en 2020 pour viols et agressions sexuelles sur quatre enfants à Saintes (Charente-Maritime), a déjà reconnu "des faits sur" sa petite-fille, a rappelé Me Kurzawa.
Le 28 février, lors d'une audience de son procès en cours à Vannes, Joël Le Scouarnec, en présence de son fils aîné venu témoigner à la barre, avait avoué "des actes d'abus sexuels sur (sa) petite-fille".
Le parquet de Lorient avait fait savoir dans la foulée à la presse que "des suites judiciaires" seraient données à ces déclarations.
Le 28 février, le directeur d'enquête, membre de la section de recherches de Poitiers, avait été interrogé cinq heures durant par la présidente Aude Buresi qui lui avait demandé s'il était "en mesure d'affirmer qu'aucune victime n'(avait) été oubliée".
Le gendarme avait affirmé que ses enquêteurs avaient "recensé la majorité des victimes dans (les) écrits" de l'accusé.
"Avancée formidable"
Qualifiant l'ouverture de cette nouvelle enquête d'"avancée formidable", Me Francesca Satta a indiqué avoir été contactée par des personnes estimant avoir été "oubliées" par les enquêteurs.
"Tous les jours, j'ai de nouvelles personnes qui me contactent et qui me demandent si elles ne sont pas potentiellement victimes de Joël Le Scouarnec", a déclaré à l'AFP Me Satta, avocate de plusieurs parties civiles au procès de Vannes.
L'AFP a pu consulter le procès-verbal d'une personne ayant déposé plainte début mars pour "viol sur mineur" contre Joël Le Scouarnec.
Pour Me Céline Astolfe, avocate de l'association Fondation pour l'Enfance, "il est vraisembable que nous n'ayons pas une liste exhaustive des victimes" de M. Le Scouarnec.
"D'abord parce qu'on s'est limité aux carnets, parce qu'on n'a pas interrogé non plus la Sécurité sociale", afin d'avoir la liste intégrale des patients de l'ex-chirurgien, a souligné Mme Astolfe.
"On sait qu'il y a un nombre de victimes qu'on n'est pas en mesure de chiffrer, qui seront a priori jamais identifiées", a-t-elle regretté.