La proposition de loi visant à "restaurer l'autorité" de la justice à l'égard des "mineurs délinquants" et de "leurs parents", soutenue par le gouvernement, reprend une série de mesures annoncées au printemps par Gabriel Attal, alors Premier ministre.
"Nous tenons la promesse qui a été faite après les émeutes de 2023, celle de renforcer notre arsenal pénal, celle de lutter plus efficacement contre la délinquance des mineurs", a déclaré l'ex-chef du gouvernement qui, redevenu député, a décidé de porter ces mesures à l'Assemblée.
"La naïveté tue. L'aveuglement sacrifie une partie de notre jeunesse", a-t-il lancé à l'adresse de la gauche, vent debout contre son texte qu'elle estime "dangereux" et qui "court après l'extrême droite".
L'Assemblée l'a adopté par 125 voix contre 58, avec le soutien du camp gouvernemental, du RN, et de ses alliés ciottistes. La chambre basse a rétabli plusieurs mesures supprimées lors de l'examen en commission fin novembre. Les députés ont notamment acté la création d'une procédure de comparution immédiate pour les mineurs de 16 ans pour des faits graves.
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"Répression comme seul horizon"
Un article-clé visant à ne plus appliquer d'atténuation des peines, sauf décision motivée du juge, pour des mineurs âgés de 16 ans et plus, auteurs de faits graves, et multirécidivistes a également été rétabli.
La gauche a fustigé des mesures "qui bafouent" les grands principes de la justice des mineurs.
"Est-ce que vous croyez qu'au fond, punir les parents, enfermer les enfants, va régler le problème de la délinquance? Croyez vous que la prison règle le problème de la délinquance? Elle la nourrit", a lancé la députée socialiste Sandrine Runel.
Pour l'écologiste Pouria Amirshahi, ce texte "traduit la bascule triste de notre époque, celle par laquelle la répression devient le seul horizon d'un pouvoir en mal de solution de fond".
Les députés ont aussi approuvé le durcissement de sanctions envers les parents de mineurs délinquants. Un juge des enfants pourra par exemple donner une amende civile aux parents qui ne répondraient pas aux convocations aux audiences et auditions.
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"Instrumentalisation de la justice"
Il s’agit d’un texte "mièvre", "une coquille vide" pour le Rassemblement national qui a toutefois voté pour, car il envoie "un signal", selon les mots de Sylvie Josserand. Cette élue RN s'était félicitée la veille de la reprise d'une mesure "longtemps prônée" par son parti, la fin de l'excuse systématique de minorité.
Le texte a été adopté grâce à une forte mobilisation du bloc central, et notamment des députés macronistes. Une double victoire pour Gabriel Attal, dans le creux de la vague après plusieurs revers, et pour qui l'examen avait valeur de test.
Plusieurs élus de son camp avaient partagé leur malaise, déplorant un seul volet répressif. Le député Ludovic Mendes, regrettait par exemple que le texte ne "ne traite qu'une partie du problème".
Son texte avait également provoqué une levée de boucliers dans le monde judiciaire.
Plus d'une dizaine de syndicats et organisations d'avocats, de magistrats, et d'agents de la protection judiciaire de la jeunesse, avaient organisé mercredi des rassemblements pour s'ériger contre une "instrumentalisation de la justice pénale des mineurs à des fins sécuritaires". Ils ont demandé davantage de "moyens" pour mettre en oeuvre plus efficacement les mesures déjà existantes.
Le texte pourrait être encore musclé au Sénat, le garde des Sceaux Gérald Darmanin ayant annoncé, dans une interview au Parisien, vouloir introduire de nouvelles mesures lors de son examen prévu le 25 mars à la chambre haute.
Le ministre souhaite notamment l'introduction de jurés populaires pour juger les délits commis par des mineurs, étendre une mesure judiciaire de couvre-feu aux mineurs délinquants "dès leur sortie des cours et les week-ends", ou renforcer l'usage du bracelet électronique pour les mineurs.
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