En janvier, une arme à balle caoutchouc a même été brandie devant le parvis de la gare. Son propriétaire, Gehad Rejim est chauffeur de taxi, implanté en Savoie. Il assure à l'AFP avoir été pris à parti par des conducteurs Uber et s'être "défendu".
Nichée au milieu des montagnes, la ville possède la dernière gare desservant les 3 Vallées, l'un des plus grands domaines skiables du monde réunissant des stations emblématiques, telles que Val Thorens et Courchevel.
Selon la mairie, plus de 300.000 touristes transitent chaque année par sa gare ferroviaire et routière, où arrivent les TGV en provenance de Londres ou Paris.
Avec des courses allant de 90 à 140 euros, ce marché représente une "poule aux oeufs d'or", reconnaît Sébastien Dumarais, président de la chambre syndicale des artisans taxis de Savoie.
Celle-ci attire de plus en plus de chauffeurs extérieurs, utilisant des applications (Uber, Bolt). Alors qu'ils n'étaient qu'une dizaine l'an dernier, ils seraient une centaine actuellement, selon la mairie, ce qui pose un problème de stationnement pour les habitants et de fortes tensions.
Habituellement calme, la ville a connu, outre les épisodes d'intimidation sur le parvis de la gare, la destruction, la semaine dernière, de six véhicules par incendie, dont trois appartenant à des chauffeurs de plateformes.
"Du jamais vu à Moutiers" reconnaît la maire Chantal Martin qui condamne ces violences et "attend tous les résultats de l'enquête".
Face aux clients "Kalach", les chauffeurs VTC réclament des mesures de sécurité
La saison d'hiver
Mehdi Mansouri est l'un des sinistrés. "J'ai investi 4.000 euros dans le logement pour l'hiver, je ne peux pas m'arrêter" raconte ce Lyonnais, qui a dû louer un autre véhicule pour poursuivre sa saison.
"C'est très difficile de travailler à Lyon. Il y a tellement de chauffeurs que les prix chutent", dit-il pour expliquer son choix de passer l'hiver en Savoie. "Si je pouvais faire que deux semaines par saison à la mer où à la montagne ça m'irait..."
Chauffeur pour les plateformes depuis un an, ce métier lui permet de travailler tout en proposant des vacances à ses sept enfants, chose qu'il ne peut habituellement "leur offrir".
Pour tous, la problématique principale est le nombre de chauffeurs.
"Clairement, s'il y avait moins de chauffeurs à Lyon et à Paris, il n'y aurait pas besoin de s'exporter et créer de la tension ailleurs" dénonce Mehdi Mejeri, président de l'Association des chauffeurs indépendants lyonnais.
Pour lui, il faut réguler le nombre de véhicules en fonction des besoins, afin d'éviter les "distorsions de marché" dans "les secteurs où il n'y pas besoin d'autant de chauffeurs" comme Moûtiers.
"Quand on n'avait qu'une dizaine (de chauffeurs extérieurs), on faisait avec", relève aussi Guillaume Léger Grain président de l'association des transporteurs Savoyards de personnes qui réunit des taxis et VTC (voitures de transport avec chauffeurs) locaux. "Maintenant, ce n'est plus possible."
Uber : quels sont les meilleurs passagers en France ?
Parking
Autre sujet de dispute: la zone où stationnent les chauffeurs de VTC entre deux courses. Les deux camps n'interprètent pas le Code des Transports de la même manière.
Pour les taxis et VTC locaux, les chauffeurs originaires de Lyon doivent retourner à leur "base". Pour Mehdi Mejeri il suffit de se garer sur un parking de Moutiers en dehors de la voie publique, comme celui d’un supermarché.
"Avec la configuration de Moûtiers, les chauffeurs de plateforme sont majoritairement sur la chaussée", affirme toutefois Guillaume Léger Grain.
Un VTC "ne peut pas pratiquer la maraude, c'est-à-dire circuler ou stationner sur la voie publique pour rechercher des clients, ni bien entendu démarcher dans les halls de gare ou d’aéroport" rappelle la préfecture de Savoie dans un communiqué.
La préfecture a annoncé des "contrôles des forces de l'ordre renforcés" dans tout le département, "pour couvrir les abords des gares et de l’aéroport, l’intérieur de leur enceinte et les stations de sports d’hiver".
Taxis volants : innovation ou cauchemar écologique ?