Pour s'y retrouver dans ce kaléidoscope, voici un mode d'emploi des partis politiques allemands, traditionnellement associés à une couleur, qui vont s'affronter aux élections législatives prévues le 23 février. Avec un point acquis: la formation du prochain gouvernement s'annonce très compliquée.
Rouge: Parti social-démocrate (SPD)
Le parti de centre-gauche du chancelier Olaf Scholz, 66 ans, est le plus ancien d'Allemagne. Ses origines remontent au mouvement socialiste et ouvrier qui s'est structuré dans les années 1860.
Avec la rose rouge comme symbole, il reste proche des syndicats, attaché à un Etat social fort et à un objectif de justice sociale.
Le SPD s'est longtemps enorgueilli que sa politique de dialogue avec Moscou ait contribué à mettre fin à la guerre froide. Parmi les anciens chanceliers du SPD, figurent Willy Brandt et Helmut Schmidt.
Noir: Union chrétienne-démocrate (CDU)
Le parti conservateur allemand, dirigé par l'ancien avocat d'affaires Friedrich Merz, 69 ans, est attaché à la discipline budgétaire et à l'économie de marché, à l'ordre public et aux "valeurs familiales" traditionnelles.
M. Merz a ramené le parti plus à droite que la voie centriste tracée par Angela Merkel, durcissant notamment le discours contre l'immigration irrégulière.
La CDU a conclu une alliance permanente avec l'Union chrétienne-sociale (CSU), parti conservateur de Bavière (sud) dirigé par l'ambitieux Markus Söder.
Parmi les anciens chanceliers de la CDU, citons Konrad Adenauer, premier dirigeant de la RFA après la Seconde Guerre mondiale, et Helmut Kohl, "le père" de la réunification de l'Allemagne en 1990.
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Jaune: Parti démocrate libre (FDP)
Le FDP, qui prône libéralisme économique et sociétal, a longtemps été le principal "troisième parti" d'Allemagne, jouant un rôle pivot dans la formation et la chute de plusieurs coalitions depuis les années 1980. Mais au vu des derniers sondages il pourrait échouer de peu à atteindre le seuil de 5% pour entrer à la chambre des députés.
Son chef, l'ancien ministre des Finances Christian Lindner, 45 ans, a provoqué la crise gouvernementale qui a atteint son paroxysme lorsque M. Scholz l'a limogé au début du mois de novembre.
Habitué des provocations, cet amateur de Porsche a récemment choqué en déclarant qu'"une pincée de Milei et de Musk ferait du bien à l'Allemagne", référence au président argentin ultralibéral Javier Milei et au milliardaire de la tech, Elon Musk, proche de Donald Trump.
Les Verts
Les Verts sont issus du mouvement de protestation écologiste et antinucléaire des années 1970 et 1980.
Ils ont depuis longtemps remisé les pulls en laine et les slogans pacifistes de l'époque pour entrer dans plusieurs coalitions régionales et nationales au sein desquelles ils défendent ardemment l'idée européenne.
Après la réunification, ils ont intégré des groupes d'activistes de l'ancienne Allemagne de l'Est communiste.
Le vice-chancelier et ministre de l'Economie, Robert Habeck, 55 ans, est le principal candidat des Verts aux élections, aux côtés de la ministre des Affaires étrangères, Annalena Baerbock.
Bleu: Alternative pour l'Allemagne (AfD)
Le parti d'extrême droite, créé il y a dix ans sur une ligne eurosceptique, a depuis adopté un programme anti-immigrés et anti-islam virulent, des positions pro-russes et climato-sceptiques.
Il s'est insurgé contre la politique d'accueil des réfugiés, défendue en 2015 par Angela Merkel lors de l'afflux de migrants de Syrie et d'Afghanistan fuyant la guerre.
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Certains responsables de l'AfD utilisent parfois des expressions renvoyant à l'époque nazie et le renseignement intérieur a placé sous surveillance les composantes les plus radicales du parti.
Menée par Alice Weidel, 45 ans, l'AfD est créditée de près de 20% des voix, ce qui en ferait le deuxième parti du pays, particulièrement implanté dans l'ex-Allemagne de l'Est.
Les autres partis maintiennent autour de l'AfD un "cordon sanitaire", refusant toute alliance avec cette formation.
Violet: Alliance Sahra Wagenknecht (BSW)
Formé il y a moins d'un an, le parti BSW a d'abord gagné en popularité sous l'impulsion de sa dirigeante Sahra Wagenknecht, 55 ans, ancienne égérie du parti d'extrême gauche Die Linke. Mais il s'est essoufflé ensuite et pourrait échouer de justesse, selon les derniers sondages, devant le "mur" des 5%.
Mme Wagenknecht, une habituée des talk-shows télévisés, sans expérience gouvernementale, a grandi dans l'ancienne RDA communiste et défend des positions anticapitalistes.
Elle s'oppose également à l'Otan, aux bases américaines en Allemagne et souhaite un arrêt des livraisons d'armes à l'Ukraine.
Elle prône une ligne dure contre l'immigration, ce qui lui vaut le qualificatif de "conservatrice de gauche". Forte de ses premiers succès électoraux, elle a rejoint les coalitions au pouvoir dans deux Etats régionaux de l'Est du pays.
Des coalitions Tutti Frutti
Après la coalition rouge-jaune-vert d'Olaf Scholz, surnommée "feu de signalisation", les sondages suggèrent que l'Allemagne pourrait se diriger vers une grande coalition "noire-rouge", dirigée par la CDU avec le SPD, un modèle largement éprouvé dans le passé.
Mais l'attelage ne pourrait pas suffire pour une majorité. Si les Verts s'y associent, la coalition "Kenya" ou "Afghanistan", noire-rouge-vert, comme les drapeaux de ces pays, serait née.
Si c'est le FDP qui se joint aux conservateurs et aux sociaux-démocrates, les couleurs correspondraient à celles du drapeau national allemand, en faisant une coalition dite "Allemagne".
L'Allemagne a été privée d'une coalition nationale noire-jaune-verte "Jamaïque" en 2017, lorsque le FDP s'est retiré des pourparlers en vue de former un gouvernement.
Enfin, une alliance noir-rouge-violet de la CDU, du SPD et de la BSW, surnommée la coalition "mûre", comme le fruit, est envisagée au niveau des Länder mais considérée comme très improbable au niveau national.
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