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Ossements retrouvés au Mexique : ce que l'on sait

La découverte d'ossements calcinés dans un ranch du nord-ouest du Mexique laisse de nombreuses questions sans réponse sur la violence extrême des narcotrafiquants et l'insuffisance des autorités locales.
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Cette affaire renvoie le Mexique à la "tragédie humaine", dit l'ONU, de ses plus de 100.000 disparitions forcées, pour la plupart liées à la narco-violence. 

L'Etat du Jalisco est le plus touché, avec quelque 15.000 cas. C'est le fief du Cartel Jalisco Nueva generacion (CJNG), l'une des huit bandes criminelles d'Amérique latine placées par le président américain Donald Trump sur une liste d'organisations "terroristes". 

Voilà ce que l'on sait de l'affaire de Teuchitlán, à 60 km à l'ouest de Guadalajara, la capitale de l'Etat du Jalisco.

Mexique : les vrais narcos


Quels sont les faits avérés?

Les membres d'un collectif de proches de personnes disparues ont localisé le 5 mars le ranch Izaguirre (en fait, une ferme abandonnée) après avoir reçu un appel anonyme, explique le correspondant photo de l'AFP à Guadalajara, Ulises Ruiz, qui les accompagnait pour l'occasion.

Comme des dizaines d'autres "chercheurs" de personnes disparues ailleurs au Mexique, ils ont creusé le sol, dans l'espoir de retrouver des fragements osseux leur permettant d'identifier un proche qui manque à l'appel depuis des semaines, des mois ou des années.

Dans trois trous, ces membres du collectif "Guerreros Buscadores" ("Guerriers chercheurs") ont découvert des os calcinés, ainsi que des vêtements et 200 chaussures à l'intérieur du ranch.

Des représentants des autorités les accompagnaient. Le parquet a confirmé la découverte de "restes osseux calcinés, dont le nombre reste à déterminer".


Des crématoriums clandestins ?


Le collectif affirme avoir retrouvé "plusieurs fosses, des crématoriums".

"On a constaté qu'il n'existe pas de structures fonctionnant comme des fours", a au contraire conclu jeudi le bureau du procureur de Jalisco dans un communiqué.

Il faut "voir si réellement cet endroit fonctionnait comme un crématorium", avait dit plus tôt le procureur général de la République, Alejandro Gertz.

En revanche, le collectif et les autorités sont d'accord pour parler d'un centre d'entraînement, sans doute à l'usage d'une bande criminelle.

Il y avait une zone "d'entraînement tactique et une autre pour le conditionnement physique", selon le parquet régional.


Des "recrues assassinées" ?  

"Nous parlons d'un centre de recrutement pour nos jeunes", affirme Índira Navarro, la chef de file du collectif "Guerreros Buscadores".

Explication: le Cartel Jalisco Nueva Generacion (CJNG) est soupçonné de procéder à des recrutements forcés de jeunes, par des enlèvements ou de fausses offres d'emplois.

En 2024, les médias et les collectifs ont documenté 30 cas de jeunes qui ont disparu près de la grande gare routière de Guadalajara.

Les restes humains retrouvés sur place pourraient être ceux de "recrues assassinées", d'après Jorge Ramírez Plascencia, qui enquête sur la crise des disparus à l'Université de Guadalajara.

Le ranch de Teuchitlan "était un camp d'entraînement" pour "la préparation de tueurs présumés", poursuit-il.

Des violences extrêmes voire des actes barbares présumés feraient partie de la "formation", ajoute-t-il, mentionnant "la torture, le démembrement, la tolérance à la mort". Et l'incinération des corps.


Pourquoi le parquet local du Jalisco est mis en cause ?
             

La propriété avait déjà été saisie en septembre après des combats entre l'armée et le CJNG, l'un des deux plus puissants du Mexique. Dix personnes avaient été arrêtées.

Des restes osseux ayant subi une "exposition thermique" avaient déjà été retrouvés, selon l'expression du parquet du Jalisco à l'époque, qui avait ensuite terminé les recherches et l'enquête.

La découverte d'autres ossements six mois plus tard par le collectif "Guerrero Buscadores" met en question le travail du parquet local.

Les premières enquêtes ont été "insuffisantes", a admis le parquet du Jalisco.

"Il n'est pas croyable qu'une situation de cette nature n'ait pas été connue par les autorités locales", a déclaré le procureur général de la République, Alejandro Gertz.

L'affaire a été transmise au Procureur général de la République, à la demande de la présidente Claudia Sheinbaum.

Le Jalisco est gouverné par le Mouvement citoyen (MC, centre), qui avait présenté un candidat à l'élection présidentielle de juin dernier remportée par Claudia Sheinbaum (Morena, gauche).

"Il faudrait voir exactement ce qui s'est passé avec le parquet régional", a déclaré la présidente. 

Claudia Sheinbaum devient la première femme présidente de l'histoire du Mexique

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