Depuis des décennies dans le pays --qui a fait de l'islam sa religion d'Etat après la partition avec l'Inde--, les Ahmadis sont victimes de violences, en raison de leur croyance en un prophète postérieur à Mahomet.
La Constitution les désigne comme non-musulmans depuis 1974 et une loi leur interdit depuis 1984 de s'affirmer musulmans et de propager leur foi.
Malgré tout, vendredi, jour de la grande prière musulmane, des Ahmadis se sont réunis dans un de leurs lieux de culte -- qu'ils n'ont pas le droit légalement de nommer "mosquée"-- à Karachi, la plus grande ville du pays sur la côte.
Ils ont alors été encerclés par plus de 600 islamistes de plusieurs partis islamistes dont le parti d'extrême droite Tehreek-e-Labbaik (TLP), a constaté un journaliste de l'AFP.
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Lynché avec "bâtons et briques"
"Un membre de la communauté a été tué après que la foule l'a identifié comme un ahmadi et attaqué à coups de bâtons et de briques", a déclaré à l'AFP Mohammed Safdar, un haut responsable de la police locale.
Les membres du TLP --un parti qui appelle régulièrement ouvertement au meurtre de non-musulmans-- ont scandé "mort aux Ahmadis", jusqu'à l'arrivée des forces de l'ordre.
Celles-ci ont décidé de placer "environ 25 Ahmadis en détention préventive" pour les protéger parce que leur vie était menacée", a ajouté M. Safdar.
Régulièrement, au Pakistan, la police assure détenir des personnes parce qu'elles sont menacées par une foule dans un pays où une accusation de blasphème peut mener à un lynchage collectif.
Vendredi de nouveau, des journalistes de l'AFP ont vu un fourgon pénitentiaire, escorté par des véhicules de police, sortir du complexe où se trouvait le lieu de culte. La police négociait avec des centaines de partisans du TLP pour pouvoir quitter les lieux.
Ces dernières années, les menaces et les intimidations se sont intensifiées contre les Ahmadis, et le lieu de culte attaqué vendredi avait déjà été dégradé deux fois en 2023.
Le TLP, l'un des nombreux partis qui considèrent la minorité comme hérétique, en considère les minarets comme des "structures illégales", explique son porte-parole Chafiq Amini.
Ces partis, qui comptent de très nombreux membres, bénéficient aussi souvent du soutien de la population.
Poursuites judiciaires et émigration
Abdul Qadir Achrafi, par exemple, a raconté à l'AFP qu'il s'était joint au rassemblement du TLP --auquel il n'appartient pas-- pour obliger la police à arrêter les ahmadis.
"Nous réclamons la fermeture de ce lieu et que ceux qui y dirigent les prières du vendredi soient arrêtés et poursuivis", a dit cet homme d'affaires de 52 ans.
Des partisans du TLP déposent régulièrement plainte contre des ahmadis au Pakistan, qui compte l'une des communautés les plus importantes au monde avec 400.000 à 500.000 membres.
Car, contrairement aux ahmadis d'autres pays, ils tombent sous le coup de la loi s'ils lancent l'appel à la prière ou se rendent en pèlerinage à La Mecque. Ils encourent une peine de prison de trois ans pour le simple usage de la formule de salutation habituelle "Salam Alikoum".
Depuis 1984, 4.100 ahmadis ont été poursuivis en raison de leur foi dont 334 pour blasphème, selon un décompte établi par cette communauté. La loi sur le blasphème prévoit jusqu'à la peine de mort.
De plus en plus d'ahmadis émigrent du Pakistan, surtout depuis la mort en 2010 de plus de 80 d'entre eux dans deux attaques suicides contre des lieux de culte à Lahore, dans l'Est frontalier de l'Inde.
Plus de 280 d'entre eux ont été tués, dont six l'année dernière, toujours selon le bilan de cette minorité.
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