"En France, on connaît le saké mais pas le shochu ou l'awamori, tous deux japonais, car on a moins la culture de l'alcool distillé", résume Tatsuya Koyama, conseiller rencontré par l'AFP sur le stand du Japan Sake and Shochu Makers Association, dont le comptoir aligne d'élégantes bouteilles en verre opaque venues tout droit du pays du Soleil-Levant.
Il explique que l'awamori, typique de la région de l'île d'Okinawa, est fait à base de riz, tandis que le shochu peut être issu du blé, de la patate douce, du sucre de canne ou encore du sésame: affichant en moyenne 25 degrés d'alcool, il se boit pendant les repas.
A quelques allées de là, c'est le soju, alcool de riz coréen tout aussi méconnu en Europe, qui est mis en avant par plusieurs producteurs et distributeurs.
Aromatisé mandarine, vanille ou poire, et bien sûr nature: Young-Sam Hur distribue déjà en Allemagne plusieurs déclinaisons du soju et d'autres alcools typiquement coréens. Il explique être venu à Wine Paris dans le but de "trouver de nouveaux partenaires pour se développer dans d'autres pays comme la France, l'Autriche et la Suisse".
"Les gens ont envie d'expérimenter de nouveaux goûts, et ils connaissant déjà la culture coréenne à travers la nourriture ou la musique K-pop", souligne Young-Sam Hur.
Lundi, au tout premier jour du salon professionnel Wine Paris, "la sommelière d'un restaurant parisien avec une étoile au Michelin est venue, elle a voulu tout goûter et m'a commandé deux produits, un soju et un vin de riz" coréens, se félicite-t-il.
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En cockail plutôt que pur
La Corée du Sud est un pays que Laurent Meuret connaît bien: depuis dix-neuf ans, il importe en France des alcools locaux, dont du soju.
Sa société, pilotée avec son épouse coréenne Jong Sun Yi, compte aujourd'hui plus de 400 clients dans l'Hexagone, la majorité restant encore des restaurants et épiceries asiatiques. Mais le couple note un intérêt grandissant de la part de supermarchés de proximité non asiatiques, comme ces points de vente Intermarché, Carrefour City ou encore Franprix en région parisienne où ils ont réussi à placer leurs produits.
"Il y a une vraie évolution, on commence à sortir de la communauté coréenne ou asiatique", résume le couple franco-coréen, qui explique qu'"au supermarché, le point d'entrée n'est pas forcément l'alcool mais plutôt les produits d'épicerie comme les nouilles de soba, l'huile de sésame, la sauce soja, et ensuite le consommateur les associe avec un petit vin de prune ou un soju".
Le baijiu est pour sa part une eau-de-vie typiquement chinoise, à base de sorgho et de blé. Mais elle peine à percer sur le marché européen "car il fait 53 degrés et ses arômes ne ressemblent à aucun des spiritueux occidentaux à base de raisin", souligne Flavie Rigaut-Courbères, conseillère vente et dégustation pour Moutai, premier groupe de spiritueux chinois et première marque de baijiu.
Ses bouteilles de baijiu — dont le modèle phare est un flacon blanc à étiquette rouge, vendu 329 euros — figurent déjà dans les bars des palaces parisiens Lutetia et Shangri-La. "On essaie d'amener la clientèle française vers le baijiu via les cocktails", détaille Mme Rigaut-Courbères.
"Il y a plus de 1.000 références de spiritueux qui sortent chaque mois, il faut donc se distinguer par l'aromatique, mais aussi le visuel des bouteilles", renchérit Olivia Catania, responsable commerciale pour la France de la société Tchin, premier importateur de spiritueux chinois en Europe.
Sur son comptoir, le baijiu de la distillerie Yanghe se distingue ainsi par des flacons en verre bleuté et un bouchon travaillé. En 2024, à l'occasion des soixante ans de la signature des accords diplomatiques entre la France et la Chine, une bouteille spéciale mêlant un dessin de coq français à celui d'un dragon chinois avait été imaginée, et un exemplaire avait été remis au président Emmanuel Macron.
Le phénomène du mukbang par Hugo Becker