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Main arrachée d'un gilet jaune en 2018 : un major CRS sera jugé à Paris

Malgré des réquisitions de non-lieu, un juge d'instruction a ordonné début décembre le procès d'un CRS pour blessures involontaires sur un manifestant "gilet jaune" qui a eu la main arrachée dans l'explosion d'une grenade en novembre 2018.
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e procès doit se tenir devant le tribunal correctionnel de Paris, a appris mardi l'AFP de source proche du dossier.

A l'issue de plus de quatre ans d'information judiciaire, le magistrat instructeur a estimé que le major, aujourd'hui âgé de 53 ans, n'avait certes pas été "animé par une volonté" de blesser Gabriel Pontonnier, mais qu'il n'avait pas pris les précautions nécessaires au lancer de la grenade.

Jackie D. a tiré "en direction d'un groupe d'individus" malgré "d'importantes quantités de fumées" et malgré "l'obscurité" qui l'empêchaient de voir correctement.

Et le major "n'a jamais cherché à savoir s'il avait pu blesser quelqu'un" et a même omis "d'annoncer son tir sur les ondes", a souligné le juge dans son ordonnance rendue le 4 décembre et dont l'AFP a eu connaissance mardi.

A plusieurs reprises, le juge relève que le tir n'a pas été effectué en binôme, avec un superviseur.

Contacté par l'AFP, son avocat, Martin Dier, n'a pas souhaité s'exprimer.

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"Pas né CRS"

L'analyse du juge d'instruction contraste avec celle du ministère public, qui avait requis un non-lieu en avril.

Pour le parquet de Paris, l'usage de cette grenade était "nécessaire et proportionné" et réalisé dans le cadre légal prévu.

L'Inspection générale de la police (IGPN, la "police des polices") avait eu la même lecture, relevant la "situation insurrectionnelle" du 24 novembre 2018 et que Jackie D. était alors "à court" d'autres types de grenade.

La GLI-F4 est une grenade contenant une charge explosive constituée de 25 grammes d'un explosif générant un effet assourdissant, une onde de choc et la dispersion de gaz lacrymogène.

Elle est utilisée dans certaines conditions "assez extrêmes", selon un commandant de police entendu pendant l'enquête.

Ce jour-là, le préfet de police avait fourni une autorisation orale, a souligné l'IGPN au cours des investigations.

Jackie D. a lui assuré au magistrat instructeur avoir tiré au "meilleur endroit" possible. "Je ne suis pas né CRS, je le suis devenu", avait-il aussi fait valoir. "Et de l'ensemble de mes formations, (...), aucune ne mentionne un quelconque superviseur pour l'emploi d'une grenade à main".

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"Vies fracturées"

Cette décision de le renvoyer devant un tribunal "est le fruit d'une application rigoureuse des textes régissant l'emploi de la grenade GLI-F4", ont salué les avocats de la famille Pontonnier, William Bourdon, Vincent Brengarth et Emma Eliakim.

Cette "avancée récompense le travail acharné mené avec la famille depuis plus de six ans", ont-ils insisté auprès de l'AFP, regrettant toutefois le non-lieu prononcé pour le chef de mise en danger.

"On attend vraiment que les dates du procès soient fixées pour y croire", a réagi auprès de l'AFP la mère de Gabriel Pontonnier, Dominique, aussi présente le jour des faits. "Toute une famille a été impactée. Ils ont fracturé nos vies."

"On n'a plus le même rapport à la vie, on s'est recroquevillé sur nous-mêmes. Il y a tant de choses que je ne m'autorise plus à faire, en pensant à Gabriel", a poursuivi Dominique Pontonnier.

"Mon fils jouait de la basse. De quel droit pourrais-je continuer à jouer du piano alors que Gabriel ne peut plus ?"

Aujourd'hui âgé de 27 ans, son fils, qui était en formation BTS en chaudronnerie quand il a été blessé, ne travaille pas.

"Il n'a pas seulement eu la main arrachée... Sortir dans la rue l'angoisse. Il lui manque un orteil alors il ne peut plus courir, jouer au foot. Il lui manque de la peau, donc porter un pantalon avec une ceinture lui fait mal", raconte sa mère, qui s'en occupe encore la nuit "quand il fait des cauchemars".

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