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Vaisselle réutilisable : des restaurants toujours à la traîne

A l'heure où la communauté internationale négocie à Busan, en Corée du Sud, un traité contraignant pour réduire la pollution au plastique, en France, films, gobelets et barquettes en plastique font encore déborder les poubelles de nombreux restaurants.
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L'utilisation de ces contenants à usage unique par la restauration rapide a beau être proscrite depuis près de deux ans, le plastique est toujours roi dans ce Veng Hour, restaurant asiatique situé dans un centre commercial de La Défense, près de Paris.

L'AFP a pu constater qu'une vingtaine de clients attablés mangeaient dans des contenants jetables. Certains avaient devant eux jusqu'à quatre barquettes en plastique puisque chaque élément du repas est emballé séparément.

Depuis le 1er janvier 2023, la restauration rapide doit recourir à de la vaisselle réutilisable pour les repas et les boissons servis à table, qu'il s'agisse des gobelets, couvercles, assiettes, récipients ou couverts, en application de la loi relative à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire (Agec), votée en 2020.

L'obligation s'applique aux restaurants pouvant accueillir au moins 20 convives.

Selon le gouvernement, cette mesure doit permettre d'éviter 200.000 tonnes de déchets par an.

Parmi les 13 enseignes visitées par l'AFP, seulement cinq respectaient pleinement cette réglementation. D'autres établissements, comme Five Guys, proposaient des options réutilisables pour la nourriture, mais pas pour les boissons, servies dans des verres jetables.

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Obstacles au changement

En avril 2023, le gouvernement avait mis à l'amende trois établissements à la suite d'une série de contrôles dans 16 restaurants.

Selon le gouvernement, ces contraventions peuvent aller jusqu’à 7.500 euros.

"Depuis ces premières inspections, c'est presque silence radio", affirme Célia Rennesson, directrice générale de Réseau Vrac et Réemploi, une association qui propose des solutions pour que les restaurants puissent s'adapter aux normes de réemploi.

Pour Mme Rennesson, cette application de la loi qu'elle juge laxiste explique en partie que certains commerces ne ressentent pas l'urgence de s'y conformer.

"Il y a des restaurateurs qui nous disent 'Nous, on attend d'être contrôlés et de devoir payer pour changer'", raconte-t-elle.

Une étude de l'impact de la loi Agec, publiée en mai 2024 par l'Assemblée nationale, fait état de 300 visites réalisées par les inspecteurs de la Direction générale de la prévention. "Mi-novembre 2023, 38 % des établissements contrôlés ne respectaient pas la réglementation", indique ce rapport.

Tout comme Mme Rennesson, les rapporteurs recommandent d'augmenter "largement" la fréquence des inspections pour améliorer le respect de la législation.  

La Direction générale de la prévention des risques (DGPR) affirme que ce "retard constaté" dans la mise en œuvre des mesures est aussi causé par les délais de livraison des équipements de vaisselle et de lave-vaisselle ainsi que la mise en œuvre de "travaux de grande envergure, nécessitant parfois l'obtention d'un permis de construire".

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Un défi pour les petites chaînes

La plupart des grandes chaînes (McDonald's, KFC, Burger King) se sont conformées à la loi en adaptant leurs cuisines, une tâche qui s'avère ardue pour les plus petits restaurateurs.

"Nous n'avons qu'une seule personne chargée de (réfléchir à) l'élimination de la vaisselle jetable, alors que les grandes chaînes profitent de plus de ressources", a expliqué Veng Hour à l'AFP.

L'entreprise, qui n'a jamais été contrôlée, réfléchit depuis quatre ans à des solutions pour respecter la loi, mais "les coûts élevés des travaux" ralentissent sa transition, dit-elle.

Entre autres, Veng Hour affirme devoir payer de sa poche les travaux nécessaires pour adapter ses cuisines aux lavages de contenants réutilisables.

Malgré ces embûches, la chaîne de restauration assure qu'elle se mettra au pas de la loi au cours de l'année prochaine, en commençant par effectuer des travaux de réaménagement dès le premier trimestre de 2025.

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