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Polluants éternels : une ONG saisit le Conseil d'Etat pour demander le retrait d'un herbicide

L'association Générations Futures a annoncé mardi saisir le Conseil d'Etat pour demander le retrait des produits à base de flufenacet, utilisés notamment dans l'agriculture céréalière et à l'origine de contaminations au TFA (acide trifluoroacétique), un polluant éternel, dans l'eau et l'alimentation. 
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L'ONG, qui a publié plusieurs enquêtes pour dénoncer la présence de TFA dans l'eau potable, a engagé d'autres actions pré-contentieuses pour obliger la France à contrôler de manière rigoureuse cette substance qui, selon plusieurs études, pourrait être nocive pour le foie et la reproduction (risques de malformations).

Neuvième herbicide le plus utilisé en France selon l'ONG, le flufenacet a été classé en septembre comme perturbateur endocrinien par l'Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA). Sa dégradation est l'une des principales origines de formation du TFA, avec les gaz fluorés réfrigérants.

En novembre, Générations Futures avait envoyé à l'Anses, l'agence sanitaire, une demande de retrait des produits à base de flufenacet. 

Mais l'absence de réponse dans un délai de deux mois, "synonyme de refus implicite", a ouvert la voie au recours devant le Conseil d'Etat, a expliqué Me Hermine Baron, l'avocate de l'ONG, dans un point presse. 

Ils sont partout, mais c'est quoi les polluants éternels ?

"Une position attentiste"

En France, la surveillance du TFA, que l'Europe ne rend pas obligatoire, est parcellaire. "Aucune analyse officielle n'a encore été produite", dénonce l'association.

"Le TFA est présent partout mais il n'est recherché nulle part", a dénoncé Me Baron.

La France dit attendre les résultats d'une analyse nationale, qui ne seront pas connus avant 2026. Pour Générations Futures, "cette position attentiste" est "inacceptable au regard des preuves accablantes de contamination déjà disponibles".

L'association engage donc cette procédure et réclame également au ministre de la Santé et au directeur général de la Santé de modifier un arrêté de janvier 2007 pour intégrer le TFA dans le suivi sanitaire systématique des eaux et dans les denrées alimentaires.

L'association dénonce par ailleurs l'insuffisance de la norme indicative et provisoire retenue par la France pour le TFA (60 microgrammes par litre), selon elle insuffisante.

Elle rappelle que plusieurs autres pays européens comme les Pays-Bas, le Luxembourg ou la Belgique, ont déjà adopté des normes plus restrictives, et demande que la France applique "le principe de précaution".

Mais le principal problème reste la pollution à la source, ajoute Générations Futures. La France "n'envisage aucune mesure préventive pour limiter les émissions de TFA liées aux pesticides", dénonce-t-elle.

Ses actions interviennent dans un contexte d'inquiétudes croissantes autour de la qualité de l'eau potable en France et de la toxicité des PFAS, ces molécules développées par l'industrie pour leur résistance et leur durabilité, dont font partie les TFA.

Outre une loi sur l'interdiction de certains PFAS qui doit être discutée jeudi à l'Assemblée nationale, des citoyens se mobilisent : une pétition en ligne, alertant sur la nécessité de protéger davantage l'eau potable des pollutions, lancée par le député écologiste Jean-Claude Raux, a déjà recueilli plus de 75.000 signatures. 

Après le déclenchement de plusieurs procédures locales, les avocats Emilie Chandler et Julien Bayou, ancien dirigeant du parti écologiste EELV, ont également annoncé mardi leur intention de lancer une action judiciaire nationale baptisée #ContaminationPFAS pour obtenir l'indemnisation de toutes les victimes de ces pollutions.

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