"Je n'ai plus le temps", avertit cette femme de 68 ans, qui a perdu 28 kilos, dans un entretien avec l'AFP. Depuis le 29 septembre, elle n'a ingéré que du café, du thé et des sachets de réhydratation.
Cette date correspond aux cinq ans d'emprisonnement de son fils, activiste égypto-britannique de 43 ans, en prenant en compte sa période de détention antérieure au procès.
Le célèbre blogueur et opposant politique a été arrêté en septembre 2019 après avoir partagé un texte sur la torture dans les geôles égyptiennes. Il a été condamné à cinq ans de prison pour "diffusion de fausses informations" en 2021.
Laila Soueif manifeste quasi quotidiennement devant Downing Street. Elle a rencontré en novembre le ministre des Affaires étrangères David Lammy, qui s'est rendu au Caire le mois dernier pour plaider pour la libération d'Alaa Abdel Fattah.
Mais elle voudrait s'entretenir avec le Premier ministre Keir Starmer pour lui demander d'en faire plus pour son fils. "Je lui ai écrit pour solliciter une rencontre", explique-t-elle à l'AFP à son domicile du sud de Londres.
"La réponse que j'ai reçue ne mentionne pas de rencontre. Il répète que (la libération d'Alaa Abdel Fattah) est en haut de ses priorités mais il dit aussi que cela prendra du temps. Je n'ai plus le temps", s'inquiète cette professeure de mathématiques à l'université du Caire.
"Très inquiet"
La sexagénaire, rendue "faible" par sa grève de la faim, a été hospitalisée la semaine dernière. Les médecins lui ont dit qu'elle avait une pression artérielle basse, un faible taux de sucre dans le sang et de potassium.
Elle a vu son fils pour la dernière fois le 7 janvier, dans la prison du Caire où il est détenu. Alaa Abdel Fattah est une figure de la révolution de 2011 qui a renversé le président Hosni Moubarak.
"Il veut aussi se mettre en grève de la faim. Pour lui c'est difficile de supporter que je fasse cela... Il est là dans sa cellule à tuer le temps", se désole-t-elle. "Il était content de voir que j'étais toujours sur pied", mais "bien sûr il est très inquiet".
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"Chaque fois que je lui rends visite je me dis que cela pourrait être la dernière fois. Je suppose qu'il pense la même chose".
Laila Soueif n'est pas du genre à abandonner la bataille, et ses enfants le savent. "Ils me connaissent suffisamment pour savoir que la meilleure chose à faire est me soutenir", dit-elle.
"Je poursuis ma grève de la faim, soit jusqu'à ce qu'Alaa soit libéré, soit jusqu'à ce que je m'effondre complètement, ou même je meure".
"Esprit combatif"
Pour Laila Soueif, Keir Starmer est le seul à pouvoir faire pression sur le président égyptien Abdel Fatah al-Sissi.
"Je ne comprends pas pourquoi M. Starmer ne téléphone pas ou ne parle pas directement avec M. Sissi", a-t-elle déclaré lundi à des journalistes lors d'une manifestation devant Downing Street. "Sans feu vert de M. Sissi, il ne se passera rien".
"Si je devais mourir", dit-elle à l'AFP, "je suis sûre que cela ferait mauvais effet, pour les membres du gouvernement britannique et les membres du gouvernement égyptien".
Elle espère que les récentes déclarations du président américain Donald Trump sur le Proche-Orient pourraient rapprocher le Royaume-Uni et l'Égypte, et aider la cause de son fils.
S'il devait être libéré, Alaa Abdel Fattah rejoindrait le Royaume-Uni pour s'occuper de son fils autiste de treize ans, Khaled, affirme Laila Soueif, qui est "très, très attachée" à son petit-fils.
Lorsqu'on lui demande si son fils a hérité d'elle son esprit rebelle, Laila Soueif n'hésite pas. "Oh oui ! Toute ma famille a assez d'esprit combatif pour tenir sur n'importe quelle durée".
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